EDITO DU MOIS DE JANVIER 2023

L’équipe de direction de l’institut FMES

Toute l’équipe de l’institut FMES vous souhaite une excellente année 2023 ! Encouragés par votre fidélité, nous continuerons d’accroître la visibilité de l’Institut et contribuerons ainsi à sensibiliser nos concitoyens aux enjeux stratégiques de la Méditerranée et du Moyen-Orient. Vous pouvez d’ores et déjà vous inscrire à la seconde édition des Rencontres Stratégiques de la Méditerranée (RSMed) qui se dérouleront à Toulon au Palais Neptune les 9 et 10 novembre 2023. Ce rendez-vous géopolitique reste une occasion exceptionnelle de croiser les regards géopolitiques, opérationnels et industriels sur le monde qui nous entoure et qui change rapidement. C’est pour cela que nous allons réactualiser notre Atlas stratégique de la Méditerranée et du Moyen-Orient qui s’est imposé comme un outil de référence.

2023 promet d’être une année décisive pour cette vaste région qui recouvre le flanc sud de l’Europe et qui est cruciale pour l’avenir de notre continent. Ce sera également une année clé pour la Turquie où se dérouleront des élections générales législatives et présidentielles (toutes deux en mai) que l’actuel président R.T. Erdogan entend bien remporter une nouvelle fois, ne serait-ce que pour pouvoir présider en octobre les commémorations du centenaire de l’établissement de la République turque, sur les cendres de l’empire Ottoman. Rien ne paraît joué à ce stade, car si la situation socio-économique s’est considérablement dégradée, le président turc a su habilement neutraliser ses principaux rivaux politiques tout en imposant son pays comme un interlocuteur incontournable dans le contexte de la guerre en Ukraine ; il est parvenu à rester neutre, malgré son appartenance à l’OTAN, et à tirer profit de ses liens privilégiés avec la Russie, l’Ukraine, les Etats-Unis et le Royaume-Uni avec lequel il semble avoir développé une connivence qu’il faudra suivre avec attention. Dans ce contexte incertain, il pourrait être tenté de faire des « coups » pour flatter le nationalisme turc et masquer ses difficultés intérieures.

A l’heure où l’on célèbre le 60e anniversaire de l’amitié franco-allemande, il serait donc opportun que la France et l’Allemagne (associées à l’Italie et à la Grèce) aient un dialogue approfondi sur leur politique à l’égard de la Turquie, que ce soit pour éviter la déstabilisation de Chypre et des Balkans (ces derniers font l’objet d’une étude par les auditeurs de la 33ème sessions des SMHES), pour garantir une présence militaire dissuasive européenne en Méditerranée orientale et pour convaincre la Turquie de cesser de bloquer l’accession de la Suède et de la Finlande à l’OTAN, face aux rodomontades du Kremlin, sans trop sacrifier les Kurdes.

La solidarité européenne est tout autant indispensable pour s’assurer d’une position cohérente face à la guerre en Ukraine. Rappelons-le : Vladimir Poutine a ouvert la boîte de Pandore. Au-delà des gains par ricochets pour les Etats-Unis et la Chine, ce conflit a valeur de test pour l’Union européenne. Car si le Kremlin l’emporte, tous ceux – dont de nombreux autocrates – qui ont de vieilles querelles à régler avec leurs voisins ou leurs rivaux pourraient être tentés de recourir sans plus d’hésitation à la force armée pour faire prévaloir leurs revendications. A fortiori pour ceux qui nourrissent frustration et mépris à l’encontre des Européens qui paieraient cher une posture de faiblesse. A cet égard, la livraison de chars occidentaux modernes à l’Ukraine n’a pour l’instant qu’une valeur symbolique et doit être relativisée ; pour peser sur le sort des opérations, il faudrait que ces chars se comptent en centaines, et non pas en dizaines. Mais elle transmet deux messages : en cas d’offensive russe majeure, les Etats-Unis et l’Union européenne compenseront les pertes ukrainiennes ; la prochaine grande offensive, qu’elle émane de Kiev ou de Moscou, ciblera probablement une zone non-urbaine où les chars lourds appuyés par une artillerie performante font la différence.

En ce début 2023, cinq crises affectant les rives sud et est de la Méditerranée restent susceptibles d’impacter directement la sécurité des Français et des Européens : 1) les tensions entre le Maroc et l’Algérie qui ne faiblissent pas et concernent indirectement la France à travers la tentative de rapprochement Macron-Tebboune et le scandale de corruption marocaine à l’assemblée européenne dans le sillage du Qatargate ; 2) la déstabilisation de la bande sahélo-saharienne accentuée par les prises de gages de la Russie dans cette zone, qui pousse les djihadistes et certaines minorités à étendre leurs actions plus au nord accentuant les risques migratoires ; 3) une intervention militaire turque majeure en Syrie au détriment des Kurdes (lire notre article du mois) qui entraînerait davantage de réfugiés en direction de l’Europe ; 4) la posture extrémiste du nouveau gouvernement ultra-nationaliste religieux de Benjamin Netanyahou qui pourrait déclencher une nouvelle Intifada entre Palestiniens et Israéliens, mais aussi accroître les risques d’affrontements entre Israël et le couple Hezbollah-Iran, avec les risques d’importation de la violence au cœur même de l’Europe ; 5) les tensions persistantes en Iran qui ne vont certainement pas ressusciter l’accord nucléaire iranien, désormais mort et enterré, mais qui peuvent accentuer les luttes de pouvoir au sommet de l’Etat.

Parvenu au seuil nucléaire, le pouvoir iranien ne le franchirait sans doute que dans trois circonstances : s’il était directement attaqué par les Etats-Unis ou/et par Israël ; en cas de prise du pouvoir par des pasdarans ultranationalistes qui pourraient avoir besoin de compenser leur absence de légitimité religieuse par la légitimité que leur confèrerait la possession de la bombe atomique ; en cas de victoire de Donald Trump ou d’un ultra-Républicain à la Maison Blanche en novembre 2024. En l’absence de provocations américaine et israélienne et à moins de l’éviction assez improbable du clergé, l’Iran ne devrait donc pas franchir le seuil nucléaire cette année. Dès lors, le débat stratégique à Washington se pose dans les termes suivants : les partenaires des Etats-Unis dans la région, à commencer par les monarchies du Golfe, vont-ils se rapprocher toujours plus de Pékin ? Et comment éviter cela ?

Vous pouvez compter sur la FMES pour vous aider à décrypter tous ces sujets au cours de l’année.

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