Rivalités entre grandes puissances : un duopole à trois, le quatrième en embuscade.

Alors que partout dans le monde, les puissances moyennes sont agitées par des recompositions régionales, un petit groupe d’Etats se livre à une compétition d’une toute autre nature qui détermine le cadre du jeu mondial. Le 21ème siècle est devenu le théâtre d’une rivalité de grandes puissances qui dépassent les autres par leurs attributs et leur ambition.

On peut caractériser la puissance, c’est-à-dire « la capacité d’une unité politique d’imposer sa volonté aux autres unités »[1], par quelques caractéristiques clés qu’il est essentiel de posséder à un certain niveau : la richesse économique, la taille de sa population, la capacité d’influence et la force militaire, en particulier atomique. Au-delà de ces critères quantitatifs, la volonté de peser dans le jeu global est une autre condition, nécessaire pour faire partie de ce club très fermé. L’ambition, la vision et l’envie de dominer restent déterminantes.

A cette aune, deux Etats dominent la compétition géopolitique mondiale : les Etats-Unis, superpuissance établie, et la Chine, superpuissance en pleine expansion animée d’une volonté révisionniste. La Chine montre une puissance économique presque équivalente à celle des Etats-Unis et sa capacité d’influence rattrape progressivement le soft power longtemps hégémonique de son rival. Sur les autres aspects, les deux pays sont antinomiques et les supériorités sont nettes et réparties : démographique d’un côté et militaire de l’autre.

Un troisième Etat, ancienne superpuissance au 20ème siècle, tente de préserver sa place sur le podium en s’adossant à la dynamique chinoise : il s’agit de la Russie, très affaiblie par sa « défaite aux points » dans le combat idéologique, économique et politique qu’elle a mené avec son rival américain pendant la guerre froide. Sa seule force réside aujourd’hui dans son aptitude militaire (fragilisée cependant par la guerre en Ukraine qui l’épuise) dont son gigantesque arsenal nucléaire équivalent à celui des Etats-Unis.

Challenger de longue date, l’Inde, qui s’est longtemps adossée à la Russie, possède aujourd’hui le potentiel pour rentrer dans cette compétition et monter sur le podium. Jusqu’à présent ses difficultés internes étaient trop importantes et son désir de puissance trop faible pour « monter sur le ring ». Narendra Modi a décidé qu’il était temps pour son pays de se doter d’une stratégie de puissance globale, s’il ne souhaitait pas subir le leadership chinois.

Le jeu est complexe : les deux grands rivaux se défient, tentent de s’affaiblir par un jeu d’alliances et de sanctions, mais coopèrent fortement économiquement. La Russie joue la confrontation, en espérant profiter des effets d’aubaines d’un possible dérapage sino-américain. L’Inde préfère construire une posture d’équilibre, en multipliant les alignements souvent contradictoires, pour se rendre indispensable et acquérir – enfin – la place de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU qu’elle estime devoir lui revenir.

L’équipe de direction de l’Institut FMES


[1] Raymond Aron « Paix et guerre entre les nations »

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