Retour sur la 2ème session méditerranéenne des hautes études maritimes pour un séminaire consacré aux accords internationaux du monde méditerranéen et à la grande plaisance

La 2ème session méditerranéenne des hautes études maritimes était en Principauté de Monaco du 3 au 5 avril 2024 pour un séminaire consacré aux accords internationaux du monde méditerranéen et à la grande plaisance.

Le cadre exceptionnel du musée océanographique de Monaco (MOM) a accueilli les auditeurs pour leur première journée de travail. Clément Lavigne, directeur de la politique des océans, a souhaité la bienvenue aux auditeurs et présenté la priorité accordée par la Principauté à la connaissance du futur des océans. Grâce aux multiples programmes mis en œuvre, le musée océanographique de Monaco est un formidable outil pour porter des messages sur la protection de l’environnement, avec 250 évènements organisés dans l’année, touchant jusqu’à un million de visiteurs par an. Les auditeurs ont également découvert la contribution du MOM à la recherche scientifique au travers des ouvrages publiés pour la sensibilisation d’un large public à l’exploitation durable des océans et au travers des voyages d’engagement pour offrir aux scientifiques l’accès à des zones peu explorées. Les auditeurs ont en particulier été très intéressés par les programmes :

  • Mondes polaires pour sensibiliser le public aux menaces critiques qui pèsent sur ces écosystèmes et soutenir la création de trois aires marines protégées dans l’océan Austral ;
  • Méditerranée pour favoriser l’objectif de protéger 30% des terres et océans d’ici 2030 par le biais de mesures de conservations efficaces, adopté lors de la 15ème réunion des parties à la Convention sur la bioversité biologique lors de la COP15 en décembre 2022 ;
  • Conservatoire mondial du Corail pour préserver et étudier les coraux et récifs coralliens particulièrement menacés par le changement climatique en créant notamment des aquariums de préservation de boutures de coraux en voie de disparition ;
  • Blue economy and finance forum (BEFF) pour mobiliser l’ensemble des acteurs publics, privés et gouvernementaux pour accélérer l’investissement dans le secteur de l’économie bleue au service de la résilience océanique.

Son excellence, monsieur le ministre d’Etat Pierre Dartout, a ensuite honoré de sa présence la session pour détailler le fonctionnement des Institutions monégasques. Responsable uniquement devant le Prince, le gouvernement princier fonctionne selon les principes de concertation, d’arbitrage et de décision interministériels comparables à ceux en vigueur en France.

S’appuyant sur sa connaissance fine des enjeux pour les territoires de la mer, acquise par ses expériences successives de préfets de départements puis régions côtières, le ministre d’Etat Pierre Dartout, a également partagé avec les auditeurs sa vision des enjeux maritimes, en insistant sur la place stratégique de la Méditerranée que ce soit pour les enjeux économiques, environnementaux mais aussi migratoires.

Grace à une économie florissante et à un taux annuel de croissance de l’emploi positif, grâce aux activités bancaires, au bâtiment et au tourisme, l’Etat monégasque est en mesure de conduire des politiques publiques attractives pour les particuliers, les salariés et les investisseurs. Elles bénéficient directement à la France compte tenu des liens économiques existants entre les deux pays. Chaque jour, 55.000 actifs viennent de France ou Italie pour travailler à Monaco, qui ne compte que 40.000 résidents dont 9000 monégasques. A l’instar de la Suisse, Monaco souhaite rester neutre au niveau international, mais s’aligne sur les décisions de l’Union européenne. Ses deux priorités internationales sont la coopération avec les pays d’Afrique francophone et la protection des Océans. Principauté tournée vers la mer, bénéficiant d’une forte audience internationale, Monaco mène une politique volontariste d’exploration des océans et de soutien aux initiatives contribuant à relever les défis maritimes environnementaux à l’échelle planétaire.

Pour terminer le cycle consacré à la protection de l’environnement, les auditeurs ont bénéficié d’une table ronde traitant des accords internationaux de protection de l’environnement avec les interventions de Florent Champion, secrétaire exécutif de l’accord RAMOGE et Viola Cattani, secrétaire permanente adjointe de l’accord PELAGOS.

Né du constat de la mortalité accidentelle élevée de dauphins dans des filets de pêche, l’Accord Pelagos pour la protection des mammifères marins en Méditerranée, est un accord tripartite franco-italo-monégasque signé en 2002. Il institue un vaste sanctuaire dans le bassin Corso-Liguro-Provençal. Dans cette aire marine protégée, l’objectif poursuivi est d’instaurer des actions concertées et harmonisées entre les trois pays pour la protection des cétacés et mammifères marins et de leurs habitats contre toutes les causes de perturbation : pollutions, bruit, captures et blessures accidentelles. La philosophie du plan consiste néanmoins à rendre compatible les exploitations humaines dans la zone avec la protection des mammifères marins. Le retour observé de phoques moines sur la côte Ligure est très encourageant et montre que la nature peut reprendre ses droits si des conditions favorables sont instaurées.

L’Accord Ramoge est un accord intergouvernemental de coopération entre les Etats français, italien et monégasque pour la préservation du milieu marin. S’appuyant sur un secrétariat permanent basé à Monaco, il s’agit d’un instrument de coordination multidisciplinaire impliquant les administrations territoriales, les institutions scientifiques, et les utilisateurs et usagers de la mer afin de mener des actions communes dans sa zone de compétence. Il a pour ambition de faire en sorte que les espaces maritimes de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, de la Principauté de Monaco et de la Ligurie constituent une zone pilote de prévention et de lutte contre la pollution du milieu marin. Cet accord comporte un volet opérationnel avec le plan RAMOGEPOL, qui est un plan d’intervention commun franco-italien-monégasque, faisant l’objet d’un exercice annuel. En situation de crise, il a été activé à plusieurs occasions dont la plus récente est pour lutter contre la pollution causée par la collision entre le porte-conteneurs chypriote Virginia et le ferry tunisien Ulysse en octobre 2018.

Grâce à ses campagnes d’exploration scientifiques qui permettent une argumentation objective de ses recommandations, Ramoge a également pu faire adopter plusieurs chartes de bonnes conduites, pour promouvoir la protection de l’environnement.

Le jeudi 4 avril 2024, le thème d’étude était principalement consacré à la grande plaisance.

A l’invitation de Bernard d’Alessandri, directeur général du Yacht Club de Monaco (YCM), une remarquable séquence a été organisée le jeudi 4 avril 2024 pour faire découvrir aux auditeurs le monde de la grande plaisance. Intervenant à ses côtés, l’administratrice en chef Armelle Roudaut-Lafon, directrice des affaires maritimes de Monaco et Isabelle Castelli, chef de la division de la police maritime et aéroportuaire de Monaco, se sont livrées aux questions de Thierry Duchesne pour faire mesurer aux auditeurs l’étendue des enjeux liés à la grande plaisance.

Sous le terme de grande plaisance, ce sont les yachts de plus de 24 mètres qui sont à considérer.

Depuis 2006 et la création du registre international français (RIF), près de 150 yachts de 24 à 45 mètres ont été immatriculés au RIF, attestant de l’attractivité de ce pavillon français. Dans un contexte fortement concurrentiel des pavillons maltais et anglo-saxons, l’enjeu pour le RIF est à présent de gagner des parts de marché sur les très grands yachts, qui auraient des effets bénéfiques pour l’emploi des marins français.

Au plan économique, 50% de la grande plaisance mondiale navigue en Méditerranée en période estivale, faisant de la grande plaisance une activité industrielle d’une importance majeure pour la Région sud. Un défi à relever est celui de la concurrence nouvelle de zones comme les Baléares, la Croatie ou la Turquie. Compte tenu de l’enjeu économique, une grande vigilance est nécessaire pour éviter le déplacement de cette clientèle vers d’autres zones.

Fortement attaquée pour son impact sur l’environnement, plusieurs initiatives sont mises en œuvre pour en mesurer de façon objective la réalité et inciter les armateurs de grands yachts à adopter des démarches vertueuses pour la préservation de l’environnement. La création du Sea Index, porté par la Yacht club de Monaco pour soutenir les armateurs dans leur démarche de réduction des émissions de gaz à effet de serre et l’expérimentation d’une installation de production d’hydrogène alimentée par de l’énergie photovoltaïque, ont en particulier retenu l’attention des auditeurs.

Dernier sujet abordé lors de cette table ronde, les nouveaux équipements de loisirs embarqués sur les grands yachts, comme les sous-marins de plaisance, dont plus de 200 sont déjà en service, les hydravions, qui sont une nouvelle tendance, représentent des risques de sécurité et de sûreté dont la prise en compte dans les eaux sous souveraineté est bien cadrée mais reste parcellaire en haute mer, y compris dans la zone économique exclusive.

Dans le cadre de leurs travaux de comité consacrés à la surveillance maritime, les auditeurs des SMHEM ont ensuite été accueillis sur le site de THALES à Sophia Antipolis par Iann Le Bris, Marc Delorme et Sandrine Heinis. Réinvestissant 1 milliard d’euros par an en R&D, THALES est à la pointe de l’innovation technologique. Présent dans 68 pays avec 77.000 collaborateurs, THALES est un groupe aux activités multiples qui équipe désormais 60 forces aériennes et 50 marines.

Une passionnante visite a permis aux auditeurs de découvrir plusieurs laboratoires de haute technologie et échanger avec des experts. Les auditeurs ont pu découvrir à cette occasion les avancées considérables apportées par « l’intelligence augmentée » dans le développement des systèmes de combat et des suites sonars et le rôle crucial joué désormais par les systèmes de drones dans le combat naval et la détection sous-marine. Les connaissances acquises et les informations rassemblées vont leur permettre d’enrichir les propositions qu’ils formuleront pour le renforcement des systèmes de protection des infrastructures critiques que sont les ports, côtes, plateformes offshores et installations sous-marines. Ces propositions feront l’objet d’un rapport qui sera présenté aux autorités maritimes lors de la cérémonie de clôture de la 2ème session méditerranéenne des hautes études maritimes, qui se déroulera le 21 juin prochain à Marseille à l’Institut des Sciences de l’Océan.

Pour permettre aux auditeurs des SMHEM de mesurer la complexité de prévenir les conflits d’usage liés aux activités de loisirs dans la bande littorale, un séminaire rassemblant Diane Levêque, directrice des affaires portuaires de Mairie de Cannes, le Col Frédéric Marc, commandant du groupement de gendarmerie maritime de Méditerranée, l’administratif en cheffe des affaires maritimes Amélie Chardin, cheffe de division action de l’Etat en mer de la Préfecture maritime de la Méditerranée, Mathieu Eyrard, directeur départemental des territoires et de la mer des Alpes maritimes et Nicolas Plumion, Président de la station de pilotage maritime des ports de Cannes – Nice – Villefranche.

Le laboratoire que constitue la ville de Cannes et sa baie s’est avéré particulièrement adapté pour mettre en lumière toutes les enjeux associés à la prévention des conflits d’usage, en raison de la très intense activité de cette rade lors de la saison estivale et des initiatives prises localement, par l’Etat et la commune, pour parvenir à canaliser les activités.

De nombreuses actions ont déjà été entreprises : information par la station de pilotage des commandants de yachts et de navires de croisières, des entreprises de location d’engins nautiques, patrouilles des brigades nautiques municipales, dépliants de sécurité diffusés par les services de la ville et les commerces d’activités nautique. Mais, l’incivisme constaté par certains utilisateurs d’embarcations, qui agissent comme des consommateurs de la mer, nécessite de renforcer la pédagogie et les sanctions.

Des très intéressants débats animés par Thierry Duchesne, directeur du département maritime de la FMES, plusieurs problématiques sont apparues comme le besoin de favoriser l’accès à une règlementation qui n’est pas rédigée en anglais, la nécessité de renforcer les moyens étatiques de surveillance dans les périodes sensibles des congés estivaux, la complexité du traitement judiciaire des infractions en mer, l’absence de législation préventive sur l’alcoolémie en mer, le besoin de redéfinir la place des moyens nautiques des polices municipales dans le dispositif global de prévention et de sanction des infractions.

A la suite de ce séminaire et pour contribuer activement à la réflexion, la FMES va poursuivre ses travaux pour formaliser des propositions à l’attention des autorités maritimes en charge de ces sujets.

Le prochain séminaire de la 2ème session méditerranéenne des hautes études maritimes aura lieu du 15 au 17 mai à Montpellier et à Port Camargue où les auditeurs travailleront notamment sur l’action des collectivités territoriales en mer et l’apport de la plaisance à l’économie bleue. Ils participeront également à un séminaire sur l’éolien en mer qui réunira les responsables étatiques de la transition énergétique et les industriels des énergies renouvelables.

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