EDITO DE FEVRIER 2023

Il y a un an exactement, la Russie envahissait l’Ukraine, déclenchant une guerre qui s’est enlisée et menace de durer des années. Contre toute attente, l’Ukraine est parvenue à résister grâce au courage exceptionnel et à la combativité impressionnante de sa population et de ses dirigeants, mais aussi grâce à l’aide occidentale, notamment dans le domaine du renseignement sans laquelle le Kremlin serait parvenu à ses fins. Par bien des aspects, cette guerre présente de plus en plus de similitudes avec la Première Guerre mondiale, mais aussi avec la guerre Iran-Irak (1980-88) oubliée des commentateurs. Elle illustre à la perfection l’antique maxime de Salluste selon laquelle « il est toujours facile de commencer une guerre, plus difficile de la terminer ». Il est difficile de déterminer quand et où se terminera ce choc des volontés clausewitzien entre deux pays qui souffrent, mais on peut prédire que son issue déterminera le positionnement d’un nouveau rideau de fer qui séparera la Russie de l’Europe pour de longues années.

Par ses conséquences multiples (alimentaires, énergétiques, politiques et stratégiques), la guerre en Ukraine a affecté bien évidemment l’Europe, mais également le Moyen-Orient et l’Afrique, véritable front indirect de Poutine à l’égard de l’Europe, avec la percée du groupe russe Wagner et la diffusion  spectaculaire du sentiment anti-Français. Elle concerne également l’Extrême-Orient comme en témoigne l’article du mois consacré aux gesticulations militaires et balistiques en Asie du Nord. De nombreux autocrates ne se sont toujours pas positionnés, attendant de savoir qui l’emportera. Quel que soit le prochain « coup » de Vladimir Poutine (nouvelle offensive, bombardements de terreur par missiles balistiques, annexion de la Biélorussie, essai nucléaire, actions de déstabilisation des pays occidentaux…), un point paraît acquis : les deux principaux bénéficiaires de cette guerre devraient être les Etats-Unis qui ont redoré leur blason, se sont réaffirmés en défenseurs du monde libre et ont relégitimé leurs services de renseignement, et la Chine qui s’impose comme un acteur incontournable et tente de présenter une posture d’équilibre apte à séduire le Sud ; l’empire du Milieu pourrait bien vassaliser encore plus vite une Russie affaiblie et isolée sur la scène internationale, après avoir étendu son emprise sur une partie de l’Asie, de la Corne de l’Afrique et du Moyen-Orient.

Quant à l’Union européenne, cette année de guerre pourrait avoir le mérite de sonner le tocsin, de la réveiller de son apathie et de lui montrer le monde tel qu’il est et non pas tel qu’elle aurait voulu qu’il soit. En France, chacun a compris l’utilité de disposer d’une armée robuste et bien entraînée, d’une industrie de défense compétitive et de qualité, de stocks de munitions suffisants, et d’une industrie nucléaire capable de suppléer les carences, et parfois l’incurie d’un marché de l’énergie qui n’était pas organisé pour faire face à des défis de cette ampleur. L’horloge stratégique tourne vite cependant et il est temps pour notre pays, dans le prolongement de la revue Nationale Stratégique, de structurer une politique face aux évolutions qui tendent à nous marginaliser. La France, pays occidental, européen mais également du sud par son Outre-mer, présente une singularité stratégique qu’elle doit revendiquer.

Dans ce contexte, notre conférencière du mois rappelle l’importance essentielle de l’aéronautique et du contrôle de la troisième dimension. Il est donc crucial que l’Union européenne et la France continuent de soutenir l’Ukraine pour dissuader tous ceux qui rêvent d’imiter Vladimir Poutine, et pour prendre le relai des Etats-Unis lorsque ceux-ci, lassés, estimeront la Russie suffisamment affaiblie pour porter leurs efforts ailleurs.

Début février, deux tremblements de terre ont dévasté le sud de la Turquie à la frontière syrienne. Au-delà du drame humain, cette double catastrophe aura un impact politique et géopolitique car elle survient trois mois avant des échéances électorales cruciales. Le président turc R.T. Erdogan, affaibli et critiqué par sa population en colère, a donné un tour de vis pour museler encore davantage son opposition et les médias, y compris internationaux. Dans ce contexte, continuera-t-il à s’opposer à l’entrée de la Suède et de la Finlande dans l’OTAN ? reportera-t-il l’assaut programmé dans le nord de la Syrie ? Adoptera-t-il une attitude prudente remettant aux calendes grecques ses tentatives de déstabilisation de Chypre, des Balkans et du Caucase ? Ou bien sera-t-il au contraire tenté par un coup géopolitique à haute valeur symbolique lui permettant de redorer son blason ?

Pendant ce temps, l’Iran se rapproche un peu plus du seuil nucléaire, tandis qu’Israéliens et Palestiniens basculent chaque jour davantage dans une nouvelle Intifada qui ne dit pas son nom

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