SÉMINAIRE DU MOIS DE MARS DE LA 30ÈME SMHES – LE COVID 19 EST UN FREIN QUI NE RALENTIT PAS TOUS LES ENGAGEMENTS…

Fallait-il interrompre le rythme soutenu de la 30ème session méditerranéenne des hautes études stratégiques ? L’interrompre face à une crise d’ampleur inégalée dans notre histoire récente ! L’histoire de générations dont seules celles de nos aînés ont connu les privations, et pas seulement celles des libertés individuelles. Ce contexte, pesant pour chacun d’entre nous, nous rappelle qu’il faut savoir s’adapter aux situations. Il faut aussi savoir y apporter une réponse. Une réponse rapide et à l’évidence collective. Et c’est là sans doute que l’exercice apparaît plus difficile, tant les uns et les autres se sont habitués à ne pas nécessairement tenir compte des autres pour avancer. Cette crise sanitaire, sans précédent, encore qu’il n’y a pas si longtemps tout le monde craignait le pire lors de l’épisode grippal A – H1N1, une forme nouvelle dont les effets auraient pu être similaires à ceux de la grippe espagnole de 1918 qui fit, faut-il le rappeler ici, plus de cinquante millions de morts, n’a sans doute pas encore dit son dernier mot. Pour autant, il convient sans doute de ne pas noircir le tableau car l’effet de la pandémie, renforcé par la mondialisation, révèle également une mobilisation mondiale. Cette mobilisation, si elle se concrétise, pourrait atténuer les conséquences pour les populations, même si cela n’est pas de nature à affaiblir la douleur de ceux qui perdront un être cher. Affaiblir la menace voire la neutraliser car nous pouvons faire confiance à la capacité des chercheurs qui finiront par trouver l’anti poison d’un virus qui aura fait son entrée dans l’histoire.

Alors, oui la réponse est claire, il ne fallait pas interrompre la session en cours mais la poursuivre pour réfléchir collectivement aux grands enjeux auxquels nos sociétés sont confrontées. D’ailleurs, le thème relatif aux « risques et opportunités des nouvelles routes de la soie » est plus que jamais d’actualité. Il n’y a pas si longtemps, personne ne connaissait Wuhan, capitale de la province de Hubei qui compte plus de 11 millions d’habitants et dont le confinement généralisé de la population fut une première dans l’histoire. Ce thème plus connu sous le nom de « Belt and Road Initiative », déjà caricaturé avec mauvais goût sous le nom de « New Sick Road » avait permis aux auditeurs d’identifier les facteurs de risques à la fois pour nos sociétés et les ambitions chinoises. Mais ce facteur sanitaire est nouveau. Il influe évidemment sur les perspectives initiales de ce défi de très grande ampleur.

Si ce facteur de risque est d’abord d’ordre sanitaire, il est encore davantage au plan économique. Il va falloir inexorablement tirer les conséquences de la perte progressive de l’autonomie stratégique de certains pays, dont une partie de l’approvisionnement dépendait des chaines de production chinoises. Aujourd’hui, le débat sur l’approvisionnement des masques FFP2 (Filtering Face Piece) pourrait rapidement mettre en avant cette forme de dépendance conjuguée à une réduction drastique des stocks considérés comme trop chers lors de l’épisode de la grippe A H1N1 de 2009 à 2010. Deux constats s’imposent donc. Le premier est celui de conserver son autonomie stratégique quoi qu’il arrive. C’est déjà un devoir complexe auquel il faut s’atteler rapidement. Modestement, les Think Tank, en l’absence totale de conflits d’intérêts, peuvent apporter des réponses. Deuxième constat, il est irréaliste de penser pouvoir capitaliser financièrement sur une crise. Lorsque des postures même adéquates sont adoptées, elles ont un coût et le retour sur investissement peut être faible voire nul. Le traitement sanitaire de la pandémie grippale précédemment cité avait été remarquable et on ne peut que se réjouir des résultats enregistrés. Pourtant, les dividendes n’ont été que virtuels, par comparaison au coût qu’aurait engendré une catastrophe sanitaire. Ce gain sous-évalué, associé au retour d’expérience positif qui a démontré la pertinence des réflexions engagées sur la continuité de l’action gouvernementale nous montre la voie d’une préparation aux crises qui, par définition, sortent d’une épure classique de recherche de l’efficience.

Alors, doublement oui, il fallait poursuivre les travaux de la session. Ce sont ces travaux qui contribueront à apporter les bonnes réponses pour mieux appréhender les crises et en maîtriser au meilleur niveau les différents ressorts.

Les poursuivre certes mais dans un mode nouveau qui respecte les règles de confinement. Nous le voyons aujourd’hui, la discipline, qui sous-tend l’observation des lois, des règlements et des obligations auxquels doit se soumettre un groupe, n’est pas acquise d’emblée. Les règles édictées ne sont peut-être pas la réponse absolue au traitement de cette crise mais elles en sont un instrument indubitablement efficace dans l’attente des autres leviers infléchissant le rythme pandémique. Troisième constat donc, il faudra tirer les leçons d’un civisme adapté aux exigences de notre temps. On ne peut pas indéfiniment contester telle ou telle posture pour ensuite s’interroger sur l’action de l’Etat et tout en attendre. Les principes régaliens dans la gestion des crises doivent reprendre leur primauté. Cette crise sanitaire rappelle que tout n’est pas dans les mains exclusives des acteurs économiques et dans la recherche du profit. D’ailleurs, nous le voyons bien, les dispositions prises qui seront déterminantes pour ne pas ajouter à cette crise de santé publique une crise économique et financière seront celles de l’Etat. Ici aussi, cela ne fait que confirmer la nécessité de réfléchir en profondeur à tous les sujets qui structurent nos sociétés dans un monde qui réapprend le tragique de l’Histoire.

Fort heureusement, les modes alternatifs existent et nous avons, d’une certaine manière, digitalisé le séminaire du mois de mars. C’était une première pour l’institut FMES et elle souligne de nouvelles pistes d’échanges possibles dans le cadre des formations qu’il dispense. Nous avons donc réalisé des travaux de comité pour la session qui s’est organisée en trois groupes de travail portant chacun un scénario sur le thème d’étude. Plaisir donc de retrouver les auditeurs qui ont pu rejoindre cette salle de réunion virtuelle le jeudi 19 mars, certains étant excusés parce qu’ils sont concernés de près ou de loin dans le soutien apporté à la gestion de cette crise sanitaire.

Le lendemain, le jeudi 20 mars, nous avons présenté les travaux à l’université de Toulon pour initier un échange sur l’approfondissement des recherches à réaliser pour étayer les différents scénarii. Enfin, pour parachever cette session « extraordinaire », Emmanuel Véron a prononcé une intervention sur les grands axes qui structurent les nouvelles routes de la soie en apportant un éclairage particulier sur les interactions de la Chine avec l’Afrique, continent qui prolonge stratégiquement l’espace méditerranéen. Evidemment, nous souhaiterions renouer avec les modes habituels de fonctionnement pour le séminaire du mois d’avril. Mais il nous faut préparer des solutions alternatives.

Cette posture prise pour les sessions méditerranéennes des hautes études stratégiques n’est d’ailleurs pas exclusive aux sessions car elle est appliquée dans d’autres domaines. L’institut FMES, centre ressources de la Région Sud, est très largement impliqué dans l’appui à l’économie de défense et se doit de maintenir son niveau d’activité au profit des acteurs économiques qui auront besoin de souffle pour tenir dans la durée. L’institut FMES confirmera sa résilience pour poursuivre sa mission avec un seul objectif, celui de servir l’intérêt général. En attendant des jours meilleurs pour ce printemps, nous retiendrons que l’homme se découvre en se mesurant avec l’obstacle comme devait l’écrire Antoine de Saint-Exupéry. Dont acte… nous les surmonterons !

Travaux de comité sous la direction du professeur des universités Didier Leandri, de Sea Tech. 

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