Le contexte de la crise sanitaire rendait parfois difficile la réalisation des visites dynamiques pour les auditeurs de nos sessions. Aujourd’hui, la situation est beaucoup plus favorable et permet la déclinaison complète des séminaires que nous organisons. Ils prennent d’ailleurs encore plus d’importance quand il s’agit de s’intéresser à des questions de défense et de sécurité. Car si la crise du COVID soulevait d’importantes questions d’autonomie et de souveraineté, la guerre en Ukraine ne fait qu’exacerber ces questions en accordant à celles de défense et de sécurité une place essentielle. Pour reprendre l’expression du général de Gaulle, la sécurité est le premier devoir d’un Etat, il n’y saurait manquer sans se renier lui-même.
Ce séminaire du mois de mars était donc principalement consacré aux enjeux de sécurité. Ceux du territoire national d’abord où l’on voit bien que ces questions revêtent une dimension politique très sensible en particulier dans le contexte d’une élection présidentielle. Aller à la rencontre des institutions en charge de ce volet stratégique est donc une opportunité d’appréhender plus précisément la situation sécuritaire sur la base de données précises. Elles permettent ainsi une analyse plus objective et dessinent des perspectives plus claires dans les besoins exprimés par les forces de police ou de gendarmerie. La sécurité devait également être appréhendée sous le prisme des secours apportés aux personnes et aux biens face à différents types de catastrophes. La tempête Alex et les inondations dans les vallées de La Roya et de Vésubie en octobre 2020 rappellent la place centrale des outils de secours de la sécurité civile et la réactivité dont ils doivent faire preuve pour assister les personnes en détresse. Leurs performances reconnues les engagent aussi à l’extérieur du territoire national pour combattre des incendies aux quatre coins du monde ou intervenir lors de catastrophes naturelles. Cette séquence s’inscrit donc en cohérence avec les présentations antérieures et à venir qui suscitent toujours le plus vif intérêt de nos auditeurs.
Pour introduire ce sujet stratégique, notre premier rendez-vous était consacré à la présentation de la gendarmerie nationale le jeudi 10 mars au cours de la matinée. Les auditeurs de la session se sont rendus à Marseille à la caserne maréchal des logis chef Lucien Donadieu qui abrite une brigade au cœur du 10ème arrondissement marseillais. Le général de division Philippe Ott, adjoint du commandant de Région, a accueilli l’ensemble des participants. Son exposé très complet a permis d’appréhender la globalité des missions confiées à la gendarmerie nationale et les liens qu’elle entretient avec les différents ministères qu’il s’agisse du ministère de l’intérieur, des armées ou de la justice. Cette intervention a suscité de nombreuses questions et fait découvrir les facettes méconnues d’une institution placée au contact des réalités du terrain auxquelles est exposée cette force armée. Elle fut suivie d’une présentation dynamique avec la démonstration d’une intervention du peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) et d’un groupe d’investigation cynophile (GIC). Ce sont des unités spécialisées qui luttent contre toutes les formes de délinquance dans les zones sensibles et qui apportent un soutien aux brigades territoriales lors de missions de police judiciaire ou de sûreté. Le GIC appartient à la gendarmerie départementale et dispose d’un champ d’activités techniques assez large en intervenant dans la recherche de stupéfiants, d’armes et de munitions, d’explosifs jusqu’à la recherche de personnes disparues. Appartenant aux forces armées les plus anciennes de notre histoire, la gendarmerie nationale est un outil caractérisé par sa très grande modernité pour faire face aux exigences de sécurité de notre temps. Elle fut parmi les premières composantes luttant contre la cybercriminalité. Cette modernité est aussi pleinement compatible avec les traditions d’une force dont l’organisation constitue la colonne vertébrale de tous les leviers de sécurité mis à la disposition de l’Etat.
Au terme de cette très belle séquence, les auditeurs ont pris la route vers Brignoles pour aller à la rencontre de l’unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile (l’UIISC 7). Ici aussi, une certaine singularité se dégage pour une force armée appartenant à l’armée de terre et mise pour emploi du ministère de l’intérieur. Elle relève de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSC-GC). Cette direction, assez récente puisqu’elle a été créée le 7 septembre 2011, a regroupé différentes entités pour accroître la cohérence des actions menées dans la gestion des crises sous leurs différentes formes.
Les unités d’instruction et d’intervention de la sécurité civile, au nombre de 3 en France dont l’UIISC 5 de Corte, furent créées à l’initiative du général de Gaulle à la suite de la rupture du barrage de Malpasset en 1959. Cet accident a mis en exergue l’impérieuse nécessité d’’être plus réactif dans la réponse apportée aux victimes. La réactivité est donc le paramètre structurant de cette unité disposant d’un centre d’opérations permettant l’engagement des premiers échelons de secours dans les 3 heures. L’UIISC 7 implantée sur le territoire varois s’est illustrée très souvent dans son histoire et plus récemment lors de la tempête Alex en octobre 2020. Elle intervient dans tous les domaines du sauvetage en France et à l’étranger. Composée de militaires professionnels très aguerris disposant d’une très solide expérience de terrain, l’UIISC 7 intervient aux côtés de toutes les autres composantes de la sécurité civile. Le chef de corps, le colonel Christophe Libert, et l’ensemble de son personnel ont su montrer aux auditeurs ce caractère unique et exceptionnel d’acteurs complètement engagés au service des autres. La devise de son unité « servir pour sauver » illustre bien le sens de cet engagement. Cet engagement se traduit aussi par la passion de militaires visible lors de la visite des ateliers dynamiques où les savoir-faire et les savoir-être étaient au rendez-vous.
En fin de journée, nous avons organisé une conférence animée par monsieur Nicolas Mazzucchi, géo économiste et chercheur à la fondation pour la recherche stratégique, auteur de nombreux ouvrages s’intéressant aux grands enjeux énergétiques ou technologiques pouvant influer sur l’équilibre des puissances. En la circonstance, ces questions tiennent une place de premier rang avec la crise sanitaire du COVID 19 puis la reprise économique liée à la fin de cette crise et, aujourd’hui, aux effets induits par la guerre en Ukraine. Son exposé très complet a permis d’appréhender les principales difficultés posées par un environnement géopolitique très instable mais aussi d’identifier quelques ressorts possibles dans l’espace euro-méditerranéen. Au bilan, les thèmes d’études des dernières sessions méditerranéennes des hautes études stratégiques ont toujours mis en avant ces questions énergétiques fussent-elles liées aux enjeux économiques (les nouvelles routes de la soie en Méditerranée pour le cycle 2019-2020), environnementaux (leurs conséquences en Méditerranée pour le cycle 2020-2021) et l’affirmation des puissances qui les utilisent comme un levier de pression ou d’entraînement. Ce rendez-vous a indéniablement offert quelques pistes supplémentaires de réflexion pour les travaux des auditeurs de la 32ème SMHES.
Pour la journée du vendredi 11 mars, nous avions centré les thématiques d’étude sur l’économie de défense et duale en Région. Pour la première fois, l’entreprise KONTRON ouvrait ses portes permettant ainsi de mettre en avant un centre d’excellence technologique de plus de 40 ans dans l’intégration d’équipements embarqués pour des systèmes civils ou militaires. Les présentations générales et les visites dynamiques ont démontré des performances remarquables pour des systèmes conçus ici en Région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Ce rendez-vous nous a familiarisé avec des équipements de haute technologie où toutes les nouvelles approches des objets connectés sont une réalité et nous concernent dans nos transports quotidiens ou dans l’utilisation de certains matériels. Il nous faut naturellement remercier monsieur Alain Spors, le président directeur général de l’entreprise et monsieur Vincent Chuffart qui ont répondu à notre sollicitation pour une rencontre qui en appellera beaucoup d’autres.
Dans l’après –midi, nous avons prolongé nos réflexions techniques en présentant les grands enjeux de la cyber sécurité. Monsieur Gilles Ginestet, chef de centre du centre ressources régional cyber (C2RC) opéré par l’institut FMES, s’est livré à cet exercice avec beaucoup d’enthousiasme. Il fut très écouté car le risque cyber est lui-aussi devenu une réalité dans un environnement de plus en plus numérisé. Enfin, nous avons permis à un auditeur de notre session de présenter son activité à la tête de son entreprise. Monsieur David Hornus, directeur et fondateur de CORPGUARD, a exposé les activités de son groupe dans le domaine de la sécurité privée ainsi que les acteurs qui en assurent la régulation tel que le conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). Ce fut une belle occasion de démystifier des organismes souvent caricaturés démontrant la multiplicité des actions menées sur le territoire national ou à l’extérieur dans le strict respect du droit au service de leurs bénéficiaires. Sans nul doute, les pays anglo-saxons sont plus enclins au développement d’entreprises au service de la sécurité en prolongeant ou anticipant certaines actions sans accroître la charge d’organismes gouvernementaux. En tout état de cause, mais il faut ici le rappeler, ces organismes n’ont rien à voir avec les groupes Wagner composés de mercenaires dont l’actualité parlent beaucoup en Ukraine, Syrie ou Afrique subsaharienne.
Pour clore ce séminaire le samedi 11 mars en matinée, nous avons sollicité monsieur Emmanuel, professeur des universités et ancien auditeur des SMHES, pour animer une séance de travail avec les différents comités de la session car, avant la réalisation prochaine de notre mission d’études en Israël, il était important de capitaliser les différents travaux des comités pour structurer le futur mémoire des auditeurs. Enfin, l’occasion était donnée de présenter 2ASMED, l’association des anciens auditeurs des sessions méditerranéennes, association nouvellement créée pour prolonger le lien entre les auditeurs au-delà du cycle de la session de formation proprement dite. Messieurs Aurélien Nguangue (31ème SMHES) et Bernard Maury (30ème SMHES) en ont présenté les grandes lignes et les ambitions. 2ASMED est le signal de la forte adhésion des auditeurs participants à nos sessions. C’est aussi la meilleure manière d’animer un réseau durable. Nous lui souhaitons un franc succès dans l’histoire qu’elle s’apprête à écrire.