Le 1er octobre 2021, le vice-amiral d’escadre (2s) Pascal Ausseur, Directeur général de l’institut FMES, participera à une journée de conférences à l’occasion du colloque international La Guerre et l’échiquier organisé par Dire et Chanter Les Passions en partenariat avec l’institution de gestion sociale des Armées (IGESA). Retrouvez ses pensées sur la thématique de ce colloque.

L’histoire du Monde est animée par les rapports de Puissance, c’est-à-dire la confrontation entre des groupes humains (le modèle le plus classique étant l’État) à travers leur aptitude à peser sur leur environnement. Cette puissance exige à la fois des capacités (économique, démographique, technologique, intellectuelle, militaire …) et la volonté politique et culturelle d’accepter le rapport de force avec son environnement et avec ses concurrents. La Guerre est l’outil de cette confrontation dès lors qu’il s’agit de soumettre à notre volonté un adversaire qui est un obstacle au déploiement de notre puissance, ou de résister à sa volonté de nous soumettre. Elle est, dans l’imaginaire courant, associée à l’emploi des moyens militaires, alors que cette forme de guerre ne correspond qu’à une manière particulière de soumission, celle qui s’effectue par la force. La Guerre peut également utiliser les moyens économiques, cyber, informationnels ou culturels, c’est ce que les Chinois appellent la guerre « hors limite » et les Russes la guerre « hybride ».

Les échecs sont une représentation particulièrement intéressante de cette conflictualité. Sur un strict point militaire d’abord, en organisant un combat dans un cadre espace-temps limité, par la combinaison de moyens à la fois variés et complémentaires. L’utilisation la plus subtile de ses moyens, de l’aire de manœuvre et du temps imparti pour surmonter la manœuvre de l’adversaire est assez proche de certaines situations opérationnelles. La diversité des options possibles, l’impact de la personnalité des joueurs et la nature fondamentalement interactive du jeu d’échecs lui apporte une similitude très forte avec les théâtres stratégiques ou tactiques. Mais cette proximité pourrait se retrouver également dans la guerre systémique ou « hors limite ». La bonne combinaison de l’action de chaque pièce pourrait en effet d’une certaine façon rappeler l’emploi coordonné des moyens à la disposition du chef de l’Etat en guerre.

Il faut cependant reconnaitre les limites de cette analogie. La première est liée à la dualité de la confrontation qui n’est qu’un cas de figure de la conflictualité qui opposent souvent des acteurs multiples aux objectifs variés. La parfaite symétrie des partis éloigne également le jeu d’échecs du monde réel où chacun doit jouer avec des cartes différentes. Ces deux premières caractéristiques sont probablement mieux représentées dans un jeu comme le Poker qui met également en exergue (de façon symbolique il est vrai) une caractéristique importante de la rivalité militaire : le courage, essentiel à l’affrontement des volontés. Certains jeux illustrent mieux une forme de conflictualité moins directe, en renforçant l’effet de réseau et d’asphyxie. C’est le cas du jeu de Go qui correspond si bien à la stratégie développée actuellement par Xi Jinping. D’autres encore, comme le Bridge, soulignent les enjeux de communication au sein d’une même équipe pour assurer la victoire.

Ainsi, ces jeux ne sont pas seulement révélateurs des modes de pensée stratégique des cultures qui les promeuvent, comme les Russes l’illustrent à merveille avec le jeu d’échecs, ils sont également une formidable école de réflexion, d’analyse, de psychologie et d’imagination, toutes fonctions essentielles pour gagner les conflits de demain. Car la guerre se perd d’abord dans la tête.

C’est pourquoi, dans le monde qui vient, dans lequel les rapports de force et la conflictualité reprennent malheureusement la première place, la diffusion et la pratique du jeu d’échecs sont un atout utile pour apprendre à faire ses adversaires échec et mat.

Retrouvez le fascicule complet de l’édition 2021 de La Guerre et l’échiquier, qui se déroulera le 1er octobre prochain à l’IGeSA La Marana (Corse).

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