Ce mois de septembre a illustré la bascule stratégique à l’œuvre.
Le 80ème anniversaire de l’assemblée générale des Nations Unies aurait dû être l’évènement international majeur de la rentrée. Cela n’aura pas été le cas et New-York aura surtout joué son rôle de caisse de résonnance des petits Etats du sud et de mise en valeur des tentatives occidentales pour exister. Ni Xi Jinping, ni Poutine, ni Modi n’ont fait le déplacement. C’est ainsi dans une relative indifférence que plusieurs pays emmenés par la France ont reconnu l’Etat de Palestine, dont le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie et le Portugal. Si cette reconnaissance accentue la pression sur Benjamin Netanyahou en isolant davantage le gouvernement israélien entrainé par son hubris, elle n’a pas déclenché l’électrochoc attendu. La proposition de paix portée par Donald Trump avec les pays du Golfe aura peut-être plus d’effet.
le plaidoyer du président intérimaire Ahmed al-Charaa pour la suppression effective des sanctions qui ont frappé la Syrie ou le rétablissement des sanctions onusiennes contre l’Iran face à son manque de coopération sur le dossier nucléaire étaient également attendus. Les changements stratégiques s’opèrent dans d’autres cadre, comme en témoigne l’accord de défense mutuel conclu le 17 septembre entre l’Arabie Saoudite et le Pakistan qui change les équilibres de ses deux acteurs à l’égard de l’Iran et de l’Inde. Ces reconfigurations font l’objet de la carte du mois.
Donald Trump a sans surprise profité de cette tribune pour réaffirmer son agenda intérieur populiste et nationaliste. Le président Volodymyr Zelinsky a défendu la cause de l’Ukraine et obtenu, apparemment, une évolution de la posture américaine en sa faveur, alors même que la Russie accroît la pression militaire sur le terrain. Vladimir Poutine, absent à New-York, multiplie de son côté les provocations aériennes à l’égard des Européens en envoyant ses drones survoler plusieurs Etats de l’UE et ses chasseurs longer leurs côtes, pour tester à la fois les défenses de l’OTAN et le courage politique des dirigeants européens. Les Baltes et les Danois se retrouvent ainsi en première ligne. De manière significative, le Kremlin n’a ciblé ni la Finlande, ni la Suède et il a arrêté de s’en prendre à la Pologne car il sait que ces trois Etats n’hésiteront pas à se battre si nécessaire, comme ils l’ont fait dans le passé. Plus au sud, le Kremlin a identifié la Roumanie comme l’un des ventres mous de la défense européenne. Il faut s’attendre à de nouvelles provocations, à moins que certains pays n’abattent les drones russes. Moscou a toutefois connu un revers : les partis politiques pro-européens ont battu le parti pro-russe en Moldavie, malgré un effort sans précédent de la Russie pour interférer sur les élections parlementaires sur place.
C’est à Tianjin, en Chine, que trois semaines plus tôt avait lieu le vrai somment de la rentrée. Xi Jing-Ping avait réuni autour de lui plus d’une vingtaine de chefs d’Etat autour de l’Organisation de Coopération de Shangaï, dont Vladimir Poutine, Recep Tayyip Erdogan et Narendra Modi qui a signé là son premier déplacement officiel en Chine depuis une dizaine d’années, quelques semaines après la courte guerre contre le Pakistan (dont le premier ministre était lui-aussi présent) soutenu par Pékin. Cette démonstration de puissance de la Chine, se plaçant en leader du monde non-occidental quelques semaines avant l’assemblée générale de l’ONU qu’il a snobée, marque la bascule du monde à l’oeuvre. Le premier ministre indien a clairement signifié son émancipation à l’égard de Washington, en lui montrant qu’il n’hésitait pas à pactiser autant que nécessaire avec son grand rival puisque Donald Trump traite l’Inde sans ménagement.
Pour débattre de tous ces sujets et de bien d’autres, nous vous convions aux Rencontres Stratégiques de la Méditerranée qui se dérouleront au palais Neptune de Toulon les 8-9 octobre 2025 pour ceux qui ne seraient pas encore inscrits. Le programme est alléchant, n’hésitez à nous rejoindre.
L’équipe de direction de l’Institut