Découvrez nos conseils de lecture du mois de novembre 2023.
« L’Année de la défense nationale » (2024) , Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN), 24,90€
La première édition de l’Année de la défense nationale, annuaire de l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN), sous la direction du Général Benoît Durieux, propose une analyse des évènements de l’année 2022 illustrant les recompositions internationales en cours. Réunissant les meilleurs experts en la matière, l’annuaire est structuré autour des quatre concepts de défense militaire, de défense nationale, de sécurité nationale et de sécurité internationale. L’analyse de ces grandes thématiques s’appuie sur des extraits de documents officiels, reproduits en fin d’articles et vise à livrer une réflexion informée sur les bouleversements internationaux.
La première partie de l’annuaire est consacré à la défense militaire. Le général de division aérienne Vincent Breton propose de tirer des premières leçons militaires de la guerre en Ukraine, analysant l’extension du conflit à de nouveaux domaines tels que la guerre informationnelle et les cyberattaques. Quant à l’OTAN, Olivier Schmitt analyse le nouveau concept stratégique de 2022 classant la Russie comme menace principale, suivie par le terrorisme et l’instabilité en Afrique et au Moyen-Orient. Ce nouveau concept stratégique témoigne de l’affirmation d’une position défensive de l’OTAN, faisant suite à des années de tentatives de dialogue avec la Russie. Ainsi, le déploiement de l’OTAN sur le flanc est, auquel Frédéric Pesme consacre une réflexion, s’inscrit dans cette position et répond aux inquiétudes de ces pays géographiquement proches de la Russie.
Concernant la deuxième partie consacrée à la défense nationale, l’enjeu énergétique s’illustre comme la priorité tant de la politique française qu’européenne. Le bouleversement du marché de l’énergie depuis l’invasion de l’Ukraine impose aux Etats de repenser leurs modèles afin d’assurer leurs sécurités énergétiques. Au niveau européen, la Commission européenne a présenté le plan REPowerEU en mars 2022, visant à réduire la dépendance énergétique de l’UE envers la Russie. Ce plan d’un montant de 300 milliards d’euros s’inscrit dans un objectif d’autonomie stratégique de l’UE, prévoyant par ailleurs l’accélération et le développement des énergies renouvelables. L’autonomie stratégique, impulsée par le président français, nécessite néanmoins d’adopter une vision à long terme assurant la résilience d’un nouveau modèle dépendant de l’hydrogène.
La troisième partie de l’annuaire consacrée à la sécurité nationale analyse quant à elle les risques d’atteinte aux intérêts nationaux. Renaud Bellais revient sur le discours du président de la République française annonçant en juin 2022 que la France était entrée dans une « économie de guerre ». Le spécialiste analyse la restructuration de l’industrie de défense française au sortir de la guerre froide et les limites auxquelles se confronte aujourd’hui en termes d’accroissement significatif et rapide des livraisons. Suscitant de nombreuses interrogations, la formule d’Emmanuel Macron représentait davantage une formule choc visant à repenser l’industrie de défense qu’une mobilisation exceptionnelle de l’économie.
Quant au concept de sécurité internationale, l’année 2022 a notamment été marquée par la déclaration conjointe « sur les relations internationales entrant dans une nouvelle ère et sur le développement mondial durable », publiée après la rencontre de Xi Jinping et Vladimir Poutine le 4 février 2022. Affichant une convergence idéologique sino-russe, la déclaration promeut un ordre international multipolaire, accusant sans la nommer, l’hégémonie américaine.
Cette première édition de l’Année de la défense nationale analyse donc de manière structurée les évènements de l’année 2022 et leurs implications futures à partir d’extraits de documents officiels. Nous ne pouvons que recommander cet annuaire aux lecteurs intéressés par les sujets de défense et de sécurité, notamment ceux qui préparent des concours.
Revue Diplomatie, n°76 « Géopolitique du changement climatique » (octobre-novembre 2023), 10,95€
Ce dernier numéro de Diplomatie se penche sur les enjeux du changement climatique et l’impact de ce dernier dans les relations internationales. Alors que l’année 2023 accumule les records de températures à travers le monde, l’arrivée du phénomène climatique El Niño fait craindre une accentuation du réchauffement des océans dans les prochains mois et durant l’année 2024. Agrémenté de nombreuses cartes et données scientifiques, ce numéro analyse la géopolitique du changement climatique à travers quatre thématiques complémentaires : un focus sur l’environnement et les risques climatiques, une présentation des hot spots vulnérables et un dossier consacré à la diplomatie « verte ».
2023 marque l’achèvement du 6ème rapport du GIEC, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, au terme de 8 années de travail (2015-2023). Pour la première fois depuis sa création en 1988, le groupe d’experts affirme avec certitude que 100% du réchauffement climatique est dû aux activités humaines. Ce réchauffement impacte principalement les ménages à faibles revenus, les populations autochtones, les femmes et les enfants. Le numéro consacre un dossier aux effets sur l’océan. Alors que l’on estime à 1 milliard le nombre de personnes directement dépendantes de la bonne santé des récifs coralliens, la surface de ceux-ci a diminué de moitié depuis 1870.
Sur le plan des risques climatiques, Pierre Blanc, enseignant-chercheur à Bordeaux Sciences Agro et Sciences Po, explique à quel point le réchauffement climatique est facteur de bouleversement pour la sécurité mondiale. En effet, la dégradation de la sécurité environnementale, notamment par manque d’accès à l’eau, impacte toutes les composantes de la sécurité globale : alimentaire, sanitaire, économique. Les relations diplomatiques sont également affectées par le changement climatique, ce dernier ayant fait apparaître depuis quelques années le terme de « disaster diplomacy », pour désigner le rapprochement d’Etats suite à la survenance de catastrophes naturelles. A titre d’illustration, l’auteur rappelle l’aide immédiate envoyée à Ankara par le premier Ministre grec en février 2023 après les tremblements de terre qui ont frappé le sud de la Turquie.
Alors que la COP 27 se tenait en Egypte, le dossier sur les « hot spots » montre les régions qui souffrent d’ores et déjà des effets du changement climatique. Record de températures atteint en 2023, incendies ravageurs en Grèce, disparition d’espèces dans des eaux devenues trop chaudes, la Méditerranée subit de manière particulièrement inquiétante le réchauffement climatique. En raison, la sururbanisation et la pression démographique pèsent sur un bassin méditerranéen dont les ressources en eau naturelle sont déjà faibles. La pression sur les ressources en eau fait également craindre une exacerbation des conflits au Moyen-Orient et en Afrique de l’Ouest, dans des régions déjà marquées par des contextes politico-sécuritaires fragiles.
Face à cette urgence et alors que le GIEC rappelle que chaque dixième de température compte, le numéro consacre un dossier à la diplomatie « verte ». De la COP 27 à l’adoption du premier traité international de protection de la haute mer, les cadres de coopération et les outils internationaux dédiés au changement climatique se multiplient. C’est dans ce contexte que l’Alliance of small island states (AOSIS), qui réunit une cinquantaine de petits Etats insulaires à travers le monde, s’est tournée vers le Tribunal international pour le droit de la mer, qui a examiné en septembre dernier les obligations juridiquement contraignantes des Etats concernant leurs émissions de carbone et leur impact sur les océans.
Ce numéro dresse donc un large tableau des implications du changement climatique dans les relations internationales, dont la lecture est essentielle alors que démarre la COP 28 aux Emirats Arabes Unis.
A.D