Nouvelles menace sur le détroit de Bab-el-Mandeb.
Depuis que les rebelles Houtis soutenus par l’Iran contrôlent depuis plus d’un an une partie du littoral du Yémen à proximité du détroit de Bab-el-Mandeb, une menace pèse sur la navigation maritime internationale, notamment le flux maritime entre la Chine et l’Europe. Pour y faire face, les marines occidentales ont multiplié les missions de surveillance, de même que les marines égyptienne et saoudienne. Toutefois, un nouveau seuil a été franchi avec l’attaque par missiles conduite le 1er octobre dernier contre le navire rapide HSV Swift, anciennement américain, exploité par une compagnie maritime des Emirats Arabes Unis. Le navire a été endommagé alors qu’il transportait du fret humanitaire et des passagers civils. Le 10 octobre, c’est le destroyer USS Mason qui était visé, sans être atteint, par de nouveaux tirs de missiles C 802 d’origine chinoise venus de la côte. De nouveaux tirs contre l’USS Mason ont été observés le 13 octobre. Face à ces attaques répétées, le président Barack Obama autorisait le destroyer USS Nitze à tirer des missiles Tomahawk pour détruire trois stations radars sur la côte. Il s’agissait de la première intervention directe des forces américaines dans le conflit yéménite. Le même jour, Téhéran annonçait l’envoi de deux navires de guerre dans le golfe d’Aden. La situation dans la région est donc particulièrement tendue, témoignant d’une extension du conflit yéménite en mer et remettant en exergue l’importance stratégique du détroit de Bab-el-Mandeb par lequel passent chaque jour des dizaines de porte-conteneurs et un tiers des approvisionnements français en pétrole. En quelques mois, la menace est passée du lance-roquette de type RPG tiré d’une île au missile chinois C 802 guidé par radar : une « montée en gamme » préoccupante.
Un imposant groupe aéronaval russe arrive en Méditerranée orientale.
Parti de Severomorsk, base navale de la Flotte du Nord près de Mourmansk, le 15 octobre dernier, un groupe aéronaval russe a franchi le détroit de Gibraltar le 26 octobre pour gagner la Méditerranée oriental. Le groupe comprend le porte-avions Amiral Kouznetsov avec à son bord des chasseurs bombardiers SU33 et MIG29K. Son escorte est composée du croiseur à propulsion nucléaire Piotr Veliky (Pierre le Grand), du grand destroyer Severomorsk et de cinq autres navires dont un sous-marin. C’est le plus imposant déploiement de la marine russe depuis la fin de la guerre froide. Selon les autorités russes, ce groupe aéronaval doit répondre à « toute nouvelle forme de menace, comme la piraterie et le terrorisme international ». Les navires et leurs activités ont été suivis avec une attention soutenue par les Etats membres de l’OTAN concernés par le transit maritime depuis la Norvège. Des moyens norvégiens, britanniques, français, mais aussi belges, espagnols et italiens ont pisté le groupe aéronaval, sans qu’aucun incident ne soit à signaler. L’Amiral Kouznetsov et son escorte vont certes renforcer les moyens russes déployés en Syrie mais ils sont aussi l’expression de la puissance navale retrouvée de la Russie qui va montrer son endurance et son savoir-faire. Le groupe russe va retrouver le groupe aéronaval européen articulé autour du porte-avions Charles de Gaulle, engagé dans les opérations aériennes en Irak et en Syrie. Parti de Toulon à la fin du mois de septembre, le Charles de Gaulle devrait rentrer à la mi-décembre pour commencer son arrêt technique majeur en janvier 2017. La France n’aura plus de porte-avions disponible pendant deux ans.
Sommet extraordinaire de l’Union africaine à Lomé sur la sécurité et la sûreté maritimes.
A l’issue de cinq jours de négociations, plus de 30 Etats africains ont adopté le 15 octobre à Lomé une charte contraignante sur la sûreté et la sécurité maritimes. Ce texte initié par le Togo a été validé lors du sommet qui a rassemblé 43 Etats sur les 54 que compte l’Union africaine (UA). La charte propose de coordonner les actions entre les pays du continent pour lutter contre la piraterie et les trafics de drogue, d’armes et d’êtres humains sur les côtes africaines. Ce document va s’intégrer à la Stratégie africaine intégrée pour les mers et pour les océans à l’horizon 2050, adoptée en 2012.
Ce sommet extraordinaire est une victoire diplomatique pour le Togo. La conférence – la première de grande ampleur organisée depuis 30 ans – s’est déroulée dans de très bonnes conditions. La marine française était impliquée dans la surveillance du sommet. A cette occasion, le BPC Dixmude était en escale à Lomé, permettant au ministre de la défense français d’y inviter les participants. Le ministre a notamment déclaré que « le grand enjeu de demain » est « la maritimisation de notre monde. Il faut en assurer la sécurité pour qu’elle soit synonyme de développement ». Une ombre toutefois est constituée par le refus du Cameroun de signer la Charte, alors que cet Etat était à la pointe du combat contre l’insécurité maritime dans le golfe de Guinée et dont l’implication s’était traduite par le sommet de Yaoundé en 2013. Rappelons que la France entretient une mission permanente, Corymbe, dans le golfe de Guinée et que des programmes de coopération ont été conduits pour aider les Etats riverains à s’organiser pour lutter contre les activités illicites en mer.
Inauguration de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes.
Le 6 octobre, loin de la mer, à la frontière entre la Bulgarie et la Turquie, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes a été officiellement inaugurée, moins d’un an après la proposition de sa création par la Commission européenne, en remplacement de l’Agence FRONTEX. Son directeur exécutif reste le Français Fabrice Leggeri, ancien directeur de FRONTEX. La nouvelle agence devrait être plus forte et mieux équipée pour affronter les défis que posent aux Etats membres de l’UE la migration et la sécurité aux frontières de l’Europe. Elle dispose d’un mandat élargi et de nouvelles prérogatives pour lui permettre d’agir plus efficacement. L’Agence verra notamment ses effectifs plus que doubler et elle sera en mesure d’acquérir ses propres équipements et de les déployer rapidement lors d’opérations aux frontières. Une réserve d’intervention rapide de 1500 personnes et un parc d’équipements seront mis à la disposition de l’Agence. Il est à noter que le terme de « corps européen de garde-frontières et de garde-côtes » est employé, alors qu’il ne s’agit en rien de la création d’un corps au sens statutaire du terme. Il s’agit plus d’une « fonction », au sens de la « fonction garde-côtes » française. Surtout, il faudra observer comment la nouvelle Agence va opérer en mer, principalement en mer Méditerranée où les arrivées massives se poursuivent en raison de conditions météorologiques favorables. A titre d’exemple, plus de 5 600 migrants ont été secourus le lundi 3 octobre au large de la Libye, l’un des chiffres les plus élevés depuis le début de l’année.
EURONAVAL : vitrine mondiale de l’industrie navale de défense.
Tous les deux ans se tient au parc des expositions de Paris-Le Bourget le salon EURONAVAL, cette année du 17 au 21 octobre. Cette 25ème édition a rassemblé près de 400 exposants en provenance 34 pays, ces derniers représentant 56% des participants, proportion en constante augmentations. Environ 25.000 visiteurs professionnels ont été enregistrés, en présence de 400 journalistes. Il s’agit d’un des plus importants salons pour l’industrie navale de défense en raison de son ancienneté (créé en 1968), du caractère exclusivement naval de la manifestation et du poids de l’industrie navale française de défense. Un constat général : la construction navale militaire se porte plutôt bien, stimulée par les tensions internationales (Mer de Chine méridionale, golfe d’Aden, montée en puissance de la Russie, de la Chine et de l’Inde), de la maritimisation des échanges internationaux, du terrorisme et des activités illicites en mer. Les livraisons de navires militaires neufs représentent un chiffre d’affaires annuel de 40 milliards de dollars, dont 12 milliards de dollars pour les commandes auprès des entreprises françaises. L’industrie française dispose d’un atout déterminant avec sa capacité de fabriquer les navires et de les doter d’équipements de haute technologie. Elle bénéficie également de l’expérience de la marine nationale et de sa bonne réputation opérationnelle qui permet aux matériels français d’avoir le label de « sea proven » et même pour certains le label « combat proven » aussi.
EURONAVAL a été l’occasion pour DCNS de dévoiler le design avant-gardiste de sa future frégate de 4.000 tonnes, jusqu’à présent désignée par la locution (pas très heureuse) de « frégate de taille intermédiaire » (FTI), appelée désormais Belh@rra, en référence à la célèbre vague basque et avec un @ pour souligner le caractère « connecté » de ce navire qui devrait rentrer en service à partir de 2023 dans la marine française et sur lequel DCNS fonde de grands espoirs à l’exportation.
Le gisement pétrolier offshore de Kashagan en mer Caspienne entre en production.
Après un faux départ en 2013, le gisement géant de Kashagan, découvert en 2000 au Kazakhstan est entré en production le 23 octobre. C’est l’une des plus grandes découvertes pétrolières de ces quarante dernières années, que les spécialistes appellent un champ « super géant ». Il représente un enjeu stratégique majeur pour les compagnies pétrolières qui le développent et l’exploitent, et pour le Kazakhstan en tant que pays producteur, mais aussi en terme d’impact sur la production pétrolière mondiale. Ce champ est exploité par un consortium pétrolier comprenant la société pétrolière d’État du Kazakhstan, avec notamment ExxonMobil, Shell, le groupe français Total, l’italien ENI, le japonais JSC. Son entrée en production, avec un niveau envisagé de 370 000 barils par jour d’ici la fin 2017 n’est que le début, car il y aura ensuite d’autres phases de développement. C’est un gisement d’une taille considérable qui entre en production au Kazakhstan après quinze années difficiles de recherches et de travaux (profondeur de près de 5.000 mètres à 75 kilomètres de la côte, forte teneur en soufre, structure géologique complexe) qui ont engendré de nombreuses polémiques dans l’industrie pétrolière. Le projet a coûté 50 milliards d’euros, soit cinq fois plus que prévu, et il entre en production au moment où le prix du baril est bas. La rentabilité de Kashagan devra être observée attentivement par le monde pétrolier.