SÉMINAIRE DE LA 33ÈME SESSION MÉDITERRANÉENNE DES HAUTES ÉTUDES STRATÉGIQUES (SMHES) DU 16 AU 17 MARS 2023 

« Les plans sont de peu d’importance, mais la planification est essentielle. » 

La gestion des crises est toujours difficile par l’imprévisibilité des évènements qui les produisent.   

Une imprévisibilité temporelle et dans l’ampleur des effets. Ainsi, les intempéries meurtrières dans les vallées de la Vésubie et de la Roya en octobre 2020 ont souligné la soudaineté et la brutalité d’un effet climatique pourtant annoncé.

Le niveau d’alerte n’était pas à son niveau le plus élevé, nous rappelant que les outils prévisionnels ne permettent pas toujours de caractériser l’ampleur d’un événement naturel. De plus, l’effet climatique proprement dit se conjugue bien souvent à d’autres paramètres pouvant en accroître ses conséquences, notamment lorsqu’il s’agit d’urbanisme ou d ’aménagement des territoires. Nous constatons d’ailleurs aujourd’hui que, par principe de précaution, le niveau des alertes tend à s’élever avec le risque de mobiliser parfois inutilement des unités de secours.

Compte tenu de la tension pesant sur ces unités, il importe donc d’être vigilant sur les préavis de leur mise à disposition opérationnelle. Un effort pourra naturellement rendre les prévisions plus sûres sans pour autant jamais les garantir. En revanche, la préparation des unités de secours et la planification restent un atout extraordinairement précieux dans les réponses faites aux crises quelles qu’elles soient. Enfin, la nécessité de coordonner les actions menées par des organismes différents accentue l’effet final recherché. Cette approche pour le moins militaire a fait ses preuves.

Une crise impose presque toujours une coordination avancée interservices ou interministérielle. Si un retour d’expérience est conduit sur la pandémie du COVID 19, et il l’est sans aucun doute, personne ne contestera le défaut de coordination des services rendant la gestion de crise plus difficile. N’en doutons pas, les crises brutales nous surprendront toujours par leur ampleur comme ce fut le cas encore très récemment avec les tremblements de terre en Turquie et en Syrie. Il faut donc sans démesure, mais avec raison, adapter les outils dont nous disposons en les rendant plus efficaces et toujours placer la sécurité au rang des premiers devoirs de l’État qui n’y saurait manquer sans se renier lui-même, pour paraphraser le général de Gaulle.    

Nous voici donc au cœur du séminaire du mois de mars consacré aux enjeux de sécurité au sens large. Ceux de la sécurité civile bien sûr, comme nous l’évoquions à l’instant en préambule, mais aussi ceux de la sécurité publique en allant à la rencontre des grandes institutions en charge de ce volet. S’agissant de la sécurité publique, nous avons d’emblée souligné son caractère stratégique. Elle est en effet sensible à tous les facteurs d’ordre naturel ou humain de notre environnement. La violence, les conflits, les mouvements sociaux, la radicalité idéologique, les flux migratoires, la criminalité sous toutes ses formes fussent-elles digitales pèsent évidemment sur les grands enjeux de sécurité publique. Ce séminaire a choisi deux grands acteurs exposés aux risques du quotidien et particulièrement aguerris. L’unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile (l’UIISC 7) installée à Brignoles, et la Gendarmerie Nationale en allant à la rencontre de la Région de Gendarmerie de Marseille. 

Le jeudi 17 mars était consacré à la visite d’un régiment de l’armée de terre pour le moins singulier. Il s’agit en effet d’une formation militaire de la sécurité civile (FORMISC) mise pour emploi du ministère du ministère de l’intérieur. Elle relève de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSC-GC). Cette direction, assez récente puisqu’elle a été créée le 7 septembre 2011, a regroupé différentes entités pour accroître la cohérence des actions menées dans la gestion des crises.  

Les unités d’instruction et d’intervention de la sécurité civile, au nombre de 3 en France dont l’UIISC 5 de Corte, furent créées à l’initiative du général de Gaulle à la suite de la rupture du barrage de Malpasset en 1959. Un quatrième régiment devrait prochainement voir le jour comme l’a annoncé très récemment le Président de la République. Cet ajustement raisonnable démontre bien que les caprices de notre environnement, liés pour partie au réchauffement climatique, militent pour disposer d’unités particulièrement réactives dans l’esprit de la création des trois premières. Car l’accident de Malpasset avait mis en exergue des vulnérabilités chroniques dans l’engagement des secours. 

La réactivité est donc le paramètre structurant de cette unité disposant d’un centre d’opérations permettant l’engagement des premiers échelons de secours dans les 3 heures. L’UIISC 7 implantée sur le territoire varois s’est illustrée très souvent dans son histoire et plus récemment lors de la tempête Alex en octobre 2020 ainsi que dans les secours apportés en Turquie au lendemain du tremblement de terre. Elle intervient dans tous les domaines du sauvetage en France et à l’étranger. Composée de militaires professionnels très aguerris disposant d’une très solide expérience de terrain, l’UIISC 7 intervient aux côtés de toutes les autres composantes de la sécurité civile. Le chef de corps, le colonel Philippe de Balanda et l’ensemble de son personnel ont su montrer aux auditeurs ce caractère unique et exceptionnel d’acteurs complètement engagés au service des autres. Au-delà de leurs interventions, ils ont échangé très directement avec les auditeurs de la 33ème Session Méditerranéenne des Hautes Etudes Stratégiques.

Ils peuvent être convaincu d’avoir fait mouche auprès d’un public qui ignorait le plus souvent cette singularité régimentaire et qui en perçoivent le sens et la portée aux côtés des autres acteurs, et ils sont nombreux, qui s’investissent bénévolement ou professionnellement au service des autres. La devise de ce régiment « servir pour sauver » illustre bien le sens de cet engagement. Cet engagement se traduit par la passion de militaires visible lors de la visite des ateliers dynamiques où les savoir-faire et les savoir-être étaient au rendez-vous. 

En fin de journée, les auditeurs ont pu assister à une conférence prononcée par Isabelle Facon de la fondation pour la recherche stratégique. Véritable spécialiste de la Russie, elle a abordé la relation singulière qui lie la Russie à la Turquie. Cette relation, pour le moins ambivalente, s’inscrit avec en toile de fond des jeux d’influence parfois divergents dans un contexte international évidemment tourmenté.  La guerre en Ukraine, les influences sur le pourtour de la Méditerranée, en Libye ou en Méditerranée orientale, ainsi que la recomposition géopolitique dont nous sommes les témoins sont autant de facteurs instrumentalisés par la Turquie et la Russie au moment où les tensions entre les États-Unis et la Chine s’accroissent. Les auditeurs n’ont pas manqué d’interpeller l’intervenant pour appréhender l’influence turque dans les Balkans. Ce rendez-vous a indéniablement offert quelques pistes supplémentaires de réflexion pour les travaux des auditeurs de la 33ème SMHES.  

La journée du vendredi 18 mars était consacrée à la présentation de la gendarmerie nationale. Le général de corps d’armée Arnaud Browaëys, commandant la Région de Gendarmerie Provence-Alpes-Côte d’Azur et la zone de sécurité Sud, a tenu à accueillir lui-même les auditeurs de la 33ème SMHES. Nous y sommes particulièrement sensibles.

Il a pris le soin de confier au général de division Philippe Ott, son adjoint, la présentation de la gendarmerie dans son ensemble. Son exposé très complet a permis d’appréhender la globalité des missions confiées à la Gendarmerie Nationale et les liens qu’elle entretient avec les différents ministères, qu’il s’agisse du ministère de l’intérieur, des armées ou de la justice. Cette intervention a suscité de nombreuses questions et fait découvrir toutes les facettes d’une institution placée au contact des réalités du terrain auxquelles est exposée cette force armée. Elle fut suivie d’une présentation dynamique d’un groupe d’observation et de surveillance.

Créés en 1993, ils sont spécialisés dans la surveillance et le renseignement et apportent tous les éléments nécessaires aux interventions lorsque l’enquête conduit à l’interpellation d’acteurs impliqués dans des affaires criminelles ou de délits. Les auditeurs ont pu assister à une intervention du peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) ainsi que d’un groupe d’investigation cynophile (GIC). Ce sont des unités spécialisées qui luttent contre toutes les formes de délinquance dans les zones sensibles et qui apportent un soutien aux brigades territoriales lors de missions de police judiciaire ou de sûreté. Le GIC appartient à la gendarmerie départementale et dispose d’un champ d’activités technique assez large en intervenant dans la recherche de stupéfiants, d’armes et de munitions, d’explosifs, jusqu’à la recherche de personnes disparues.

Enfin, ils ont découvert les spécificités des enquêteurs en charge de l’analyse de tous les indices ayant conduit à un crime, avec un éventail d’outils scientifiques et techniques. Appartenant aux forces armées les plus anciennes de notre histoire, la Gendarmerie Nationale est un outil caractérisé par sa très grande modernité pour faire face aux exigences de sécurité de notre temps. Elle fut parmi les premières composantes luttant contre la cybercriminalité. L’occasion fut donnée d’assister à une présentation complète des enjeux de la cybersécurité à un moment où ce risque explose avec des effets dévastateurs dans les secteurs publics ou privés. Cette modernité est pleinement compatible avec les traditions d’une force dont l’organisation constitue la colonne vertébrale de tous les leviers de sécurité mis à la disposition de l’État.  

Pour clore ce séminaire, nous avons sollicité messieurs Emmanuel Aragon et Éric Moreau, professeurs des universités de Toulon, pour animer une séance de travail avec les différents comités de la session au cours d’un dîner.

Ce rendez-vous fut très utile avant la réalisation de notre mission d’études en république de Serbie en avril prochain. Il est en effet important de capitaliser les différents travaux des comités pour structurer le futur mémoire des auditeurs. Au bilan, ce séminaire centré sur la sécurité restera un invariant du parcours de formation des auditeurs des Sessions Méditerranéennes des Hautes Etudes Stratégiques. Nous l’élargirons probablement en sollicitant d’autres acteurs.

Dans un environnement tourmenté, la sécurité intérieure est sans aucun doute l’un des tous premiers sujets de préoccupation de chacun d’entre nous. Elle conditionne notre aptitude à la résilience, d’une part, et nous permettra de mieux répondre aux risques et menaces de l’extérieur, d’autre part. Notre défense commence donc ici ! 

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