Niagalé Bagayoko, responsable du programme Afrique à la FMES
« Shithole countries ». C’est cette tirade décomplexée à propos des pays africains qui est restée comme la marque emblématique de la politique africaine menée par Donald Trump sous son premier mandat[1]. Il convient cependant de préciser que, si le désintérêt du 45 et 47ème président américain pour l’Afrique est assorti d’une ostensible condescendance et d’un mépris confinant à l’insulte, il s’inscrit néanmoins dans le droit fil du « begnin neglect » qui a toujours caractérisé la politique des présidents américains successifs envers le continent. Sous Truman et Eisenhower, l’Afrique était largement marginalisée[2], bien que Nixon, alors vice-président, ait soutenu la création d’un Bureau des affaires africaines et encouragé la décolonisation, principalement dans une optique de guerre froide. Kennedy fut le premier à placer l’Afrique au cœur de sa campagne, mêlant diplomatie et droits civiques. Il renforça la coopération avec plusieurs dirigeants africains panafricanistes comme Sékou Touré ou Kwame Nkrumah et promu le développement via le Peace Corps. Kennedy valorisa les postes diplomatiques en Afrique et nomma de jeunes diplomates engagés. Toutefois, l’approche libérale de Kennedy déclina avec l’arrivée de George Ball et la reprise du paradigme « Europe d’abord » : les conflits entre le Bureau des affaires africaines et le Bureau des affaires européennes reflétaient des visions opposées. L’administration Johnson, accaparée par les affaires intérieures et le Vietnam, accorda peu d’attention à l’Afrique. Par la suite, les présidences Nixon, Ford et Carter concentrèrent leur intérêt sur l’Afrique australe en raison de la guerre froide et de la décolonisation portugaise. Sous Ford, l’intervention soviétique à travers les troupes cubaines en Angola suscita une réponse plus active, confiée à Kissinger. Carter redonna une place centrale à l’Afrique dans sa politique étrangère, prônant une résolution pacifique des conflits, l’aide au développement et un soutien au nationalisme africain, en rupture avec les logiques géostratégiques qui prédominaient jusque-là. Sous Reagan, la politique africaine fut d’abord marquée par un désintérêt présidentiel, puis dominée par la question de l’apartheid : le Congrès força l’administration à durcir sa position envers l’Afrique du Sud avec le Comprehensive Anti-Apartheid Act[3]. Le secrétaire d’État adjoint Chester Crocker joua un rôle central, jusqu’à ce que les tensions internes entre la Maison Blanche et le Congrès réduisent son autonomie. George H. Bush adopta une approche plus pragmatique et consensuelle, mais les marges de manœuvre restèrent limitées. Son intervention en Somalie inaugura une nouvelle phase d’engagement direct en Afrique. C’est indéniablement Bill Clinton qui fit preuve de la plus grande attention envers le continent à travers la promotion de la fameuse Loi sur la croissance et les opportunités (African Growth and Opportunity Act/AGOA) et des programmes d’entrainement au maintien de la paix. C’est à l’aune de la « guerre globale contre le terrorisme » que le Président George W. Bush a quant à lui largement abordé les défis du continent. En dépit de ses origines africaines, Barack Obama, dont le père était kenyan, ne s’y est pas particulièrement investi non plus. Joe Biden, à travers l’activisme de son Secrétaire d’Etat Anthony Blinken, a cherché timidement à renouer avec l’Afrique à travers une stratégie nationale de sécurité[4] beaucoup trop standardisée et désincarnée pour prendre en considération la complexité des évolutions politiques du continent.
La réflexion stratégique américaine a progressivement intégré l’Afrique, à travers les doctrines Weinberger, puis LIC (Low Intensity Conflicts) et enfin OOTW (Opérations Other Than War), symboles de la volonté américaine de n’intervenir dans les conflits périphériques que par des moyens indirects, sans engagement massif de troupes : en 1992, le désastre de l’intervention « Restore Hope » de l’armée américaine en Somalie, dont le traumatisme a fidèlement été restitué par Ridley Scott dans son film « La chute du Faucon Noir », et le retrait précipité qui s’en est suivi, ont durablement dissuadé les dirigeants américains d’engager des troupes dans des opérations militaro-humanitaires sous mandat onusien[5]. Il paraît évident que Donald Trump ne fera pas exception à cette longue tradition qui place le continent africain au dernier rang des priorités stratégiques de la politique étrangère des Etats-Unis. Encore candidat, il avait d’ailleurs évoqué l’Afrique dans un de ses meetings en stigmatisant l’immigration d’origine africaine, « ces gens parmi les pires du monde qui viennent du Congo en Afrique [sic] », accusée par ailleurs « d’empoisonner le sang du pays »[6]. Sous ce second mandat, des tendances plus structurelles – dont certaines avaient été esquissées dans le « Project 2025 » rédigé par la Heritage Foundation[7] en collaboration avec une cinquantaine de think tanks conservateurs – marqueront probablement la politique américaine envers le continent reflétant les valeurs ou intérêts promus par les différents courants[8] qui composent le « trumpisme »[9] :
- L’hostilité envers l’Afrique du Sud, inspirée par les puissants ténors de la « droite-tech » américaine ;
- Le renforcement des liens religieux tissés à l’échelle transnationale par les différentes branches du christianisme américain ;
- Les potentielles connivences avec les souverainismes africains, portées par les courants populistes identitaires ;
- La promotion des intérêts économiques, à travers l’application au continent africain de la vision protectionniste et mercantiliste du commerce international et de l’exploitation des ressources naturelles ;
- La remise en cause des politiques de développement et du multilatéralisme actée dans la foulée de la réduction drastique du périmètre d’intervention de l’Etat fédéral américain mise en œuvre par le DOGE (Département de l’Efficacité Gouvernementale), porteuse d’une restructuration de l’appareil diplomatique américain sur le continent ;
- L’impact des restructurations de l’appareil de défense américain sur l’AFRICOM et les interventions militaires des Etats-Unis sur le continent.
La relation de Donald Trump à l’égard de l’Afrique peut être analysée à travers plusieurs équations.
L’équation sud-africaine : les techno-libertariens et la revanche de l’apartheid sur la scène internationale
Depuis l’investiture de Donald Trump, l’Afrique du Sud a fait l’objet d’une attention particulière. Ce ne sont ni le potentiel économique du pays, ni son statut de membre fondateur des BRICS, ni encore son influence politique à l’échelle du continent qui ont suscité l’intérêt de la nouvelle administration américaine. Ce sont son histoire et l’héritage de l’apartheid qui ont provoqué toute une série de mesure de rétorsion à l’encontre du pays, dans une offensive avant tout idéologique.
Les mesures de rétorsion envers l’Afrique du Sud
L’hostilité ostensiblement affichée et revendiquée contre l’Afrique du Sud s’est tout d’abord manifestée à travers le boycott par les nouvelles autorités américaines du Sommet du G20 présidé par le pays[10]. C’est ainsi que le Secrétaire d’Etat Marco Rubio a mené une violente charge contre le gouvernement sud-africain afin de justifier son refus de se rendre à Johannesburg pour la réunion des ministres des affaires étrangères les 20 et 21 février 2025. Reprenant le vocabulaire de Donald Trump, le chef de la diplomatie américaine a déclaré sur X que « L’Afrique du Sud fait de très mauvaises choses », l’accusant « d’utiliser le G20 pour promouvoir “la solidarité, l’égalité et la durabilité” [titre officiel choisi pour cette réunion] », soit une version internationale de la honnie DEI (« Diversity, Equity, Inclusivity »)[11] ainsi que la lutte contre le changement climatique également farouchement combattu. Il a été imité par Scott Bessent, le nouveau secrétaire au Trésor américain, qui ne s’est pas rendu quelques jours plus tard à la réunion des Ministres des Finances du G20. Ces mesures ont été prolongées par l’expulsion de l’Ambassadeur sud-africain aux Etats-Unis, accusé d’anti-américanisme[12] ; lors d’un séminaire en ligne organisé par un think tank basé à Johannesburg, Ebrahim Rasool avait accusé le Président américain de mener une politique basée sur le « suprémacisme ».
L’Afrique du Sud est également accusée par les États-Unis de promouvoir sur le plan intérieur des “lois racistes” au préjudice de la communauté blanche : le gouvernement sud-africain a été directement accusé par le président américain de discriminer les Afrikaners, avec une loi d’expropriation jugée inique[13]. Ces accusations ont été démenties par le gouvernement sud-africain qui a dénoncé une “campagne de désinformation”. Mais le 7 février, Donald Trump a signé un décret suspendant toutes les aides américaines à destination de l’Afrique du Sud et offert à la communauté blanche afrikaner le statut de réfugié pour lutter contre une “discrimination raciale injuste”[14]. Depuis, une cinquantaine d’Afrikaners ont été accueillis aux Etats-Unis et des mouvements « Make South Africa Great Again »[15] en soutien à Donald Trump se sont organisés en Afrique du Sud au sein de la communauté blanche[16] qui brandit de nombreux griefs contre le gouvernement de Cyril Ramaphosa : criminalité, lois de discriminations positives visant à corriger les inégalités issues de l’apartheid[17], nationalisation du système de santé, réforme scolaire risquant de limiter l’enseignement en Afrikaans. A l’inverse, le parti de gauche radical EFF, arrivé quatrième aux élections de 2024 avec un peu moins de 10% des voix, a accusé Donald Trump d’être le « grand sorcier d’un Ku Klux Klan mondial ».
Les origines sud-africaines des principaux tenants de la droite américaine techno-libertarienne
La position frontale adoptée par Donald Trump et son administration envers l’Afrique du Sud est très directement inspirée par le courant techno-libertarien[18] très puissant au sein de la Silicon Valley et plus largement du secteur de l’économie numérique américaine. Adeptes du transhumanisme, du darwinisme (voire de l’eugénisme) et ardents contempteurs du « politiquement correct » puis de la promotion de la diversité, ses principaux tenants ont développé une vision extrêmement hiérarchisée des rapports humains et, par dérivation, des relations internationales. Ces tenants de la « droite tech » ou techno-libertariens ont développé une vision du monde cherchant à « organiser le séparatisme d’une élite blanche et géniale, enfermée dans ses gated communities [quartiers résidentiels fermés] et autres “zones franches », selon Olivier Roy[19].
Ce courant, parfois qualifié de techno-césariste, inclue d’éminentes figures, qui ont non seulement en commun d’avoir initialement forgé leur fortune au sein de ladite « PayPal mafia »[20] mais aussi d’avoir grandi en Afrique du Sud. C’est le cas d’Elon Musk, nommé à la tête du Département pour l’efficacité gouvernementale (DOGE) après avoir largement financé la campagne du président américain en mettant en avant son statut d’homme le plus riche du monde, mais aussi de David Sachs[21], en charge de l’Intelligence artificielle et des cryptomonnaies au sein de l’administration, de Paul Furber, journaliste tech identifié par des équipes de chercheurs comme étant à l’origine du mouvement conspirationniste Qanon qui a inspiré le mouvement MAGA (Make America Great Again) et enfin (et peut être surtout) de Peter Thiel, le véritable doctrinaire de ce courant techno-libertarien : « quatre des voix les plus influentes du mouvement MAGA sont des hommes blancs de plus de 50 ans qui ont vécu des expériences formatrices dans l’Afrique du Sud de l’apartheid. Ce n’est probablement pas une coïncidence. (…). Ces magnats de la Silicon Valley, fervents soutiens de Donald Trump, ont pour point commun d’avoir passé leur enfance en Afrique du Sud sous le régime de l’apartheid. Une expérience fondatrice qui explique leur positionnement idéologique »[22].
Déjà, sous le premier mandat de Trump, la Rhodésie était devenue la référence de certains suprémacistes blancs, pour qui les luttes dans l’Amérique MAGA et le Zimbabwe étaient liées (« Make Zimbabwe Rhodesia Again »). « En tant qu’État ethno-nationaliste géré par une minorité d’hommes blancs rationnels et hétérosexuels, ce pays semble avoir captivé l’imagination de certains membres de l’extrême droite comme une utopie passée devant être poursuivie. Dans ces cercles, il ne s’agit pas seulement de célébrer le gouvernement raciste de Ian Smith parce qu’il a dirigé un État discriminatoire (9 % de la population dictait sa loi aux autres), mais aussi parce qu’il est perçu comme ayant excellé dans l’autarcie et la résilience après avoir rompu avec la Grande-Bretagne lors de la déclaration unilatérale d’indépendance en 1965. (…) Le Zimbabwe indépendant et l’Afrique du Sud contemporaine incarnent l’opposé de ce que veulent les suprémacistes blancs d’extrême droite »[23].
Loin d’être erratique à l’instar d’autres positionnements diplomatiques de l’administration Trump, cette politique agressive vis-à-vis de l’Afrique du Sud est ainsi le fruit d’une orientation fondamentalement idéologique. L’idéologie de l’apartheid semble avoir à cet égard rencontré à la faveur du trumpisme la culture ségrégationniste du Sud des Etats-Unis dans une exaltation du suprémacisme. En 2023, Musk a mis en garde contre un possible “génocide de Blancs en Afrique du Sud”.
La plainte sud-africaine contre Israël devant la CIJ, facteur aggravant
L’hostilité envers l’Afrique du Sud est par ailleurs aggravée aux yeux du Président américain par les positions très anti-israéliennes historiquement adoptées par les élites noires de l’ANC en mémoire du soutien apporté par l’Etat hébreux au régime d’apartheid. La plainte déposée par l’Etat sud-africain contre Israël devant la Cour Internationale de Justice (CIJ) s’inscrit dans cette trajectoire historique. Donald Trump a annoncé sa décision de réduire l’aide américaine à l’Afrique du Sud en représailles à sa plainte contre Israël[24]. Il a en outre annoncé sur son réseau Truth Social la nomination comme ambassadeur à Prétoria de M. Bozell fervent soutien d’Israël, qualifié « d’activiste conservateur » par le New York Times[25]. Avant même la réélection de Donald Trump, l’État hébreu avait lancé une offensive diplomatique aux États-Unis afin d’inciter l’Afrique du Sud à retirer la plainte déposée contre lui devant la CIJ, pour violations présumées de la Convention sur le génocide[26].
L’équation religieuse : l’Afrique et les ultra-conservateurs chrétiens américains
Un autre trait beaucoup moins visible mais néanmoins structurel de la relation des Etats-Unis avec le continent africain reste indéniablement sa dimension religieuse qui s’est affirmée de manière croissante au cours des dernières décennies. La politique américaine se caractérisant par un véritable enchevêtrement du religieux et du politique[27] ; une telle dynamique ne pourra que s’accuser davantage sous l’ère du trumpisme, particulièrement façonné et pénétré par de puissants courants chrétiens, aussi bien catholiques qu’évangéliques. A travers la formule « Bring religion back », le président américain se pose en effet en restaurateur de la tradition religieuse historique propre aux États-Unis. Il a d’ailleurs institué dès mars 2025 un « Bureau de la Foi » (White House Faith Office (WHFO) au sein de la Maison Blanche[28].
L’épiscopat africain, allié de la croisade des intégralistes catholiques américains ?
C’est le Vice-Président J.D. Vance[29] qui, au sein de l’administration Trump, apparaît comme le principal promoteur d’un courant catholique qualifié « d’intégraliste »[30] ou « post-libéral »[31] et faisant de la foi un instrument de la révolution culturelle engagée par le président américain sous sa bannière MAGA. Cette mouvance[32] va à l’encontre des perspectives théologiques développées par le pape François en matière d’immigration, de dialogue interreligieux et d’écologie[33]. Elle appelle à l’essor d’un christianisme identitaire exaltant l’héritage judéo-chrétien de l’Occident, affiche son scepticisme vis-à-vis de la science, notamment médicale avec un discours antivax, et revendique son climatoscepticisme. Ce catholicisme identitaire, qui entend défendre la chrétienté contre un Islam présenté comme conquérant, est incarné aux Etats-Unis par le cardinal américain Raymond Burke, l’un des chefs de file des anti-François depuis le début de son pontificat[34].
L’une des plus célèbres figures de ce courant du catholicisme sur le continent africain est le cardinal Robert Sarah[35]. Ce Guinéen[36] a été érigé en opposant du pape François par les milieux catholiques conservateurs francophones[37]. Réputé rigoriste et présenté comme un potentiel successeur du pape aussi bien en 2013 qu’en 2025[38], il est considéré comme ultra-conservateur en théologie morale et « restaurationniste » sur le plan liturgique[39]. C’est sa défense de la liberté sous le régime sanguinaire de Sékou Touré qui a initialement forgé sa réputation, à l’instar de la légitimité acquise par d’autres figures ecclésiastiques du continent qui se sont illustrées, quel que soit leur courant au sein de l’Institution catholique, par leur rôle majeur dans les combats menés en faveur des libertés politiques et de la dignité humaine. En dépit de ses combats souvent progressistes sur le plan politique, dont le rôle de la conférence des évêques en RDC (la CENCO/Conférence Épiscopale Nationale du Congo) est un exemple éloquent[40], l’Eglise catholique africaine adopte cependant le plus souvent à travers ses représentants des positions extrêmement strictes sur le plan sociétal qui font écho au courant intégrationniste de plus en plus en vogue aux Etats-Unis. En témoigne cette déclaration de 2015 faite par le cardinal Sarah lors d’un synode, volontiers dépeint par la presse anglo-saxonne comme un cardinal « anti-woke » : « Ce que le nazisme et le communisme étaient au XXe siècle, l’homosexualité occidentale, les idéologies abortives et le fanatisme islamique le sont aujourd’hui »[41] Ses positions farouchement anti-migratoires sont également en phase avec les prises de positions de J.D. Vance[42]. Il est par ailleurs intéressant de souligner que c’est avec le cardinal Burke et trois autres cardinaux rigoristes[43] que le cardinal Sarah a envoyé en juillet 2023 au souverain pontife cinq « dubia » (questions exprimant des « doutes ») sur l’intangibilité de la Révélation, les bénédictions d’unions homosexuelles, l’autorité du synode à venir, l’ordination sacerdotale des femmes et l’importance du repentir pour la confession.
L’Afrique est ainsi perçue comme un terrain essentiel pour ces débats aussi bien sociétaux que doctrinaux dans un contexte où l’influence de l’Église catholique[44] va bien au-delà du seul domaine spirituel en raison du rôle central que jouent ses réseaux, particulièrement les ONG à vocation caritative, dans l’éducation[45] et la santé. En effet, près de 20 % des catholiques dans le monde sont Africains[46] et selon le Vatican, sept millions d’entre eux se sont convertis au catholicisme en 2024, ce qui fait du continent l’une des régions où la croissance de l’Église est la plus rapide[47]. Le Pape François avait nommé 19 nouveaux cardinaux africains, notamment issus du Cap-Vert, de la République centrafricaine ou du Lesotho.
L’influence des églises évangéliques américaines en Afrique
Le courant religieux qualifié de « néo-protestantisme » est dominant dans le paysage américain. Selon le Pew Research Center, les Evangéliques seraient un peu moins de 100 millions aux États-Unis sur une population de 310 millions d’habitants. Les Églises évangéliques américaines[48] se sont montrées particulièrement influentes auprès du président Trump dès son 1er mandat[49]. Pour les élections de 2024, 81 % des électeurs évangéliques et pentecôtistes auraient voté pour le candidat républicain[50]. Incarnée par la télévangéliste Paula White-Cain[51], ces églises sont particulièrement puissantes sous ce second mandat. Leur influence a aussi progressé dans le monde, y compris en Afrique où ont éclos des communautés chrétiennes influencées par des prédicateurs américains prônant un christianisme radical et ultraconservateur[52]. La plupart des grands mouvements évangéliques sont apparus en Afrique depuis des décennies : les périodes pré et post-indépendance en ont été des périodes de diffusion dans les pays anglophones. L’actuel prosélytisme actif du protestantisme nord-américain en Afrique s’inscrit dans le prolongement de ces dynamiques. La mouvance la plus structurée sur le plan international est celle des Assemblées de Dieu, qui se sont fortement implantées en Afrique à travers une politique missionnaire active de la fédération américaine de Springfield : leur première implantation au Burkina-Faso, en pays mossi, remonte à 1921. Les Assemblées de Dieu ont ensuite activement contribué à la propagation du pentecôtisme en Afrique de l’Ouest. Désormais, l’expansion du pentecôtisme touche l’ensemble du continent.

Les partisans afro-américains du président Donald Trump en prière avec lui lors d’une réunion dans la salle du Cabinet à la Maison-Blanche, 27 février 2020, Washington. © CHIP SOMODEVILLA / GETTY IMAGES VIA AFP
Depuis plusieurs décennies, les Églises américaines pentecôtistes ont noué des liens avec les églises dite du « réveil ». Ces Églises appartenant au courant baptiste sont en plein essor sur le continent africain. Les « envoyés de Dieu » de ces églises américaines incitent les fidèles à affirmer leur indépendance religieuse, en s’émancipant du clergé de l’Église catholique romaine accusée d’être trop liée à la période coloniale.
En Afrique, les Églises évangéliques, adeptes d’une lecture littérale de la Bible et de la conversion individuelle, apparaissent en effet comme les principales concurrentes de l’Eglise catholique en raison de leur croissance fulgurante dans un grand nombre de pays anglophones tels le Nigeria, le Ghana ou encore l’Ouganda. Ce mouvement touche aussi de plus en plus l’Afrique francophone. Directement inspirées du modèle américain, les « mégachurches » portées par des pasteurs charismatiques prolifèrent[53] et diffusent à leurs milliers de fidèles un message célébrant le miracle, la prospérité et la délivrance. Contrairement aux représentants de l’Église catholique qui n’hésitent pas à condamner les dérives autocratiques des différents Etats, les églises évangéliques ne remettent pas en cause l’environnement politique ou les atteintes à la démocratie et à l’état de droit. Elles prônent le salut personnel par la prière, le mysticisme et les exercices de contrition physique tout en encouragent la réussite financière présentée comme un don de Dieu. Dans un contexte de décrédibilisation des partis politiques, de nombreux ministres, hauts fonctionnaires, parlementaires, voire même des chefs de l’État[54] s’investissent dans ces églises qui constituent un vivier électoral : en RCA où le poids de l’évangélisme est particulièrement marqué[55], « tout en se mettant sous la protection de la Russie et du groupe Wagner, le président Touadera a réussi à obtenir les bonnes grâces du Département d’État, par l’intermédiaire des Églises d’obédience baptiste américaines. Lui-même diacre, il participe aux offices banguissois, plein de ferveur mystique, en mettant de côté sa fonction de chef d’un Etat laïc. Il s’entoure de pasteurs qui lui servent plus ou moins d’oracles et ponctue, de plus en plus, ses discours de chef de l’Etat par des références à Dieu. A chaque séjour aux États-Unis d’Amérique, il ne manque pas de faire fructifier les liens avec l’Alliance internationale baptiste, ce qui facilite ses contacts avec le Département d’État »[56].
D’autres mouvements plus récents d’origine protestante américaine sont ausi bien implantés en Afrique mais n’entretiennent pas de relation avec le pentecôtisme, à l’instar des très « Saints de derniers jours » (mormons), des Témoins de Jéhovah, de l’Alliance universelle pour le christianisme mondial (Moon) ou encore des églises apostoliques et néo-apostoliques, adeptes de la mouvance ultraconservatrice de prédicateurs et « apôtres ». Enfin, aux États-Unis, des responsables politiques évangéliques mènent une campagne active en affirmant que les croyants au Nigeria seraient victimes de violences, voire de « génocide » : en mars 2025, à la suite d’auditions sur les persécutions visant des chrétiens, des membres du Congrès ont aisi demandé au président Donald Trump de mettre en place des sanctions contre le Nigeria[57].
Droite chrétienne américaine et chrétiens d’Afrique : mêmes combats ?
Les chrétiens américains, aussi bien catholiques qu’évangéliques, se retrouvent pour porter des causes et des combats qui trouvent un écho particulier parmi les communautés chrétiennes d’Afrique :
- La croisade contre les communautés LGBT+ est la première d’entre elles. Le rejet de l’homosexualité est particulièrement répandu sur le continent[58] où les législations criminalisant, parfois jusqu’à la peine de mort, les relations entre personnes du même sexe se sont multipliées dans de nombreux Etats au cours des dernières années[59]. « Nous, évêques africains, ne considérons pas comme approprié pour l’Afrique de bénir les unions homosexuelles ou les couples de même sexe, car, dans notre contexte, cela causerait une confusion et serait en contradiction directe avec l’ethos culturel des communautés africaines », explique ainsi le cardinal Ambongo, archevêque de Kinshasa et président du symposium des conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM) ;
- Le rejet de la théorie du genre. De nombreuses sociétés africaines ont traditionnellement des structures patriarchales qui s’opposent fréquemment aux programmes de promotion de l’égalité homme-femme ;
- La promotion de la famille traditionnelle figure parmi les thèmes particulièrement mobilisateurs parmi les populations chrétiennes d’Afrique ;
- La lutte contre le contrôle des naissances, particulièrement à travers l’interdiction de l’avortement et de la contraception y jouissent aussi d’une grande popularité ;
- Le discours anti-vax très en vogue dans un continent très épargné par la pandémie et qui s’est massivement dressé contre la vaccination anti-Covid, considérée comme une « maladie de Blanc » dont il fallait à tout prix préserver les Africains. Une importante partie de la population a considéré la prière comme l’arme la plus efficace contre la pandémie[60].
- Le climatoscepticisme est également très répandu. Il ne s’agit pas de promouvoir, comme le fond les tenants du trumpisme, le productivisme capitaliste pour lutter comme la décroissance défendue par les courants écologistes. C’est plutôt au nom d’un retour aux techniques ancestrales de valorisation de la terre et de ses ressources que se construit en Afrique un courant rejetant les approches extérieures visant à lutter contre le changement climatique[61].
L’équation populiste : Vers des connexions africaines avec le courant national-populiste américain ?
Un autre courant du trumpisme est incarné par le « populisme identitaire » ou « national-populisme » qui entre en résonnance avec les mouvements patriotiques et souverainistes qui ont commencé à proliférer sur le continent africain dès la fin des années 2010. Particulièrement séduisant aux yeux des classes moyennes et modestes qui se perçoivent marginalisées par un « gauchisme culturel » véhiculé à travers les fameuses politiques de « DEI » (Diversité/Equité/Inclusivité), la branche popularo-identitaire constitue le substrat de la très solide base MAGA sur laquelle s’est construit, alimenté et renforcé le trumpisme. Steve Bannon, cerveau de la première campagne de Donald Trump, est le véritable architecte de cette « révolution national-populiste » qui est parvenue à fédérer les mouvements initialement éclatés des Tea Party[62]. Sur les réseaux sociaux, l’influenceuse d’extrême-droite Laura Loomer s’est imposée comme l’une des figures les plus médiatiques de cette mouvance qui recrute le plus souvent ses partisans parmi les catégories blanches défavorisées. La traduction en politique étrangère des idées portées par cette mouvance se manifeste à travers le slogan d’ « America First » fièrement brandi par Donald Trump.
Les similarités avec le mouvement néo-panafricaniste souverainiste qui a émergé depuis la fin des années 2010 sont particulièrement frappantes. Sur le continent africain, des revendications portées à la fois par des Etats et des mouvements civiques, s’affirmant patriotes, nationalistes et souverainistes, ont fleuri depuis déjà plusieurs années, aboutissant à l’émergence d’une puissante vague populaire se réclamant d’un « néo-panafricanisme »[63] qui se manifeste via l’affirmation de plus en plus radicale d’une fierté nationale et d’une profonde volonté d’émancipation. Cette mouvance, irréductible à la seule dénonciation du passé colonial, porte aussi une volonté de remise en cause de l’ordre international libéral promus par les partenaires transatlantiques (Europe, Canada, Etats-Unis pré-Trump) et multilatéraux (système des Nations unies, Union européenne). L’hostilité croissante, voire le rejet viscéral manifestés par certains gouvernements, mais aussi par les opinions publiques africaines, s’exprime au travers d’une rhétorique presqu’identique à celle du courant national-populiste américain.
Les régimes qui ont pris le pouvoir par les armes entre 2020 et 2023 (Mali, Guinée, Burkina Faso, Gabon, Niger) ont été portées par cette dynamique de fond et ont consolidé leur pouvoir à force de discours et de mesures visant à promouvoir en premier lieu la souveraineté et les intérêts de leurs Etats respectifs. Le slogan du régime malien[64] depuis le coup d’état qui a renversé le Président IBK est à cet égard étrangement proche de celui répété par le président américain et se décline autour des trois principes suivants : « le respect de la souveraineté du Mali ; le respect des choix stratégiques et des choix des partenaires du Mali ; la défense des intérêts du peuple malien »[65].
Le discours patriote et souverainiste africain a puisé sa force dans l’exaspération suscitée par des démocraties trop souvent réduite à la simple tenue de scrutins électoraux, mais dont les procédures ont été fréquemment dévoyées par la classe politique civile prompte à violer l’état de droit et les libertés fondamentales, avec l’assentiment tacite ou le silence complice des partenaires internationaux. Les politiques publiques menées par les Etats avec le soutien de leurs partenaires traditionnels en matière de sécurité, de développement, d’éducation, de décentralisation ou d’urbanisation sont rejetées en raison de leur incapacité à améliorer la condition socio-économique des populations. Face à ces reniements, échecs, trahisons ou défaillances, la rue africaine a validé les prises de pouvoir par les armes ou porté par les urnes à la tête de l’Etat des mouvements tels le PASTEF au Sénégal, dont les rhétoriques nationalistes répondent aux aspirations de plus en plus souverainistes et patriotes d’une majorité de la population. On retrouve ainsi en Afrique, comme aux Etats-Unis, un vif rejet des élites classiques accusées d’avoir trahi et sacrifié le peuple.
Les techniques utilisées par les nouveaux régimes africains pour diffuser leur propre vision de l’ordre national et international sont proches de la stratégie utilisée pour imposer le mouvement MAGA : des liens étroits ont été développés avec de célèbres influenceurs sur les réseaux sociaux diffusant des messages souverainistes en langues locales auprès de millions d’abonnés.
La proximité d’un certain nombre de ces régimes avec la Russie, dont l’opportunisme stratégique a permis d’amplifier ces messages, aussi bien à travers ses prestataires sous-traitants de Wagner et de l’Africa Corps que des médias (RT, Sptunik, African Initiative), est particulièrement intéressante en ce qu’elle fait écho au rapprochement décomplexé de Donald Trump avec la Russie de Vladimir Poutine. Il est intéressant de rappeler que les Etats-Unis de Joe Biden ont été parmi les partenaires directement visés par les mesures souverainistes adoptées par le régime du Général Tiani pour satisfaire l’opinion publique nigérienne ulcérée par l’inefficacité des forces internationales déployées pour endiguer l’insécurité et la violence endémique au Sahel : les forces armées américaines stationnées au Niger ont ainsi été, à l’instar des forces françaises, contraintes de quitter le pays[66].
Plus fondamentalement, il est important de considérer que « l’Afrique et la pensée d’extrême droite ne s’excluent pas mutuellement, et [que] « l’Afrique », en tant que continent et catégorie, n’est pas insignifiante pour l’extrême droite mondiale. (…) Le courant libertaire qui en est venu à définir la politique d’extrême droite aux États-Unis et ailleurs pourrait séduire les jeunes et les entrepreneurs du continent socialisés dans un monde où l’« Africapitalisme »4, les start-up et les hommes d’affaires sont devenus des figures normalisées. Andrew Tate, une personnalité des médias sociaux qui s’enorgueillit de sa misogynie, séduit un grand nombre de jeunes hommes en Afrique. Le Kényan Eric Amunga offre désormais une alternative africaine plus proche »[67].
Ces correspondantes évidentes entre le national-populisme américain et le souverainiste néo-panafricaniste africain pourraient constituer des atouts pour développer un autre type de « soft power » américain sur le continent, à l’heure du rejet de plus en plus massif des valeurs démocratiques et libérales ainsi que du progressisme sociétal traditionnellement associés à l’influence et à la puissance américaine.
Une telle opportunité ne semble pas susciter d’appétence particulière du côté de la Maison Blanche ou du Département d’Etat. Donald Trump ne semble pas intéressé par les potentialités offertes par cette puissante vague à la fois souverainiste et conservatrice qui parcourt l’ensemble du continent africain. Le président américain ne semble pas percevoir que le courant de pensée national-conservateur qu’il promeut entre en résonance avec les orientations défendues par de nombreux Etats et opinions publiques africaines. Le vote par les Etats du Sahel central aux côtés de la Russie et des Etats-Unis contre la résolution du 25 février 2025 condamnant de nouveau l’agression russe de l’Ukraine[68] suggèrent pourtant de possibles alliances au sein d’un axe réactionnaire à l’intérieur duquel certains pays africains pourraient être appelés à jouer leur partition aux côtés des Etats-Unis et de la Russie. Le Mali et le Burkina Faso figurent toujours parmi les 22 pays africains de ladite « liste jaune », touchés par la restriction des visas d’entrée aux Etats-Unis décidée par le Donald Trump[69].
L’équation institutionnelle : l’Afrique première victime de la lutte contre l’Etat fédéral américain impulsée par Donald Trump ?
Le continent africain est particulièrement concerné par les coupes drastiques dans les dépenses de l’administration fédérale, entamées sous l’impulsion du Département pour l’efficacité gouvernementale (DOGE), initialement chapeauté par Elon Musk.
La suppression des dispositifs d’aide américains
L’une des actions les plus emblématique de la brutalité de l’intervention du DOGE est incontestablement la suppression de l’USAID (l’Agence des États-Unis pour le développement international), fondée en 1961 sous l’administration Kennedy et pilier de l’aide internationale[70]. Le jour même de son retour à la présidence des États-Unis, Donald Trump a signé un décret suspendant l’ensemble des programmes de l’Agence pour quatre-vingt-dix jours avant de les fermer définitivement, les qualifiant d’ « organisation criminelle, un nid de vipères de marxistes radicaux de gauche qui détestent l’Amérique ». Au début du mois de mars, Marco Rubio a indiqué la suppression de 83 % des programmes de l’USAID et le transfert des 17 % restants sous la tutelle du Département d’État. L’Afrique était l’une des principales bénéficiaires de cette assistance américaine[71]. Sur les dix premiers pays bénéficiant le plus des aides américaines, six étaient africains. Selon les chiffres communiqués par le site officiel, Foreign assistance[72], les financements de l’USAID en faveur de l’Afrique se répartissaient comme suit en 2024
- RD Congo : 1, 34 milliards de dollars
- Éthiopie : 1, 2 milliards de dollars
- Nigeria : 762 millions de dollars
- Soudan du Sud : 726 millions de dollars
- Soudan : 700 millions de dollars
- Kenya : 629 millions de dollars
- Mozambique : 586 millions de dollars
- Ouganda : 510 millions de dollars
- Tanzanie : 437 millions de dollars
- Zambie : 408 millions de dollars
- Burkina Faso : 313 millions de dollars
- Mali : 299 millions de dollars
- Malawi : 273 millions de dollars
- Sénégal : 203 millions de dollars
- Ghana : 187 millions de dollars[73]

Source : https://www.iris-france.org/fin-de-lusaid-consequences-internationales-et-multisectorielles/
Les réactions face à ces décisions ont été contrastées. Si la plupart des organisations non-gouvernementales et humanitaires internationales ont alerté sur le caractère dramatique de la disparition de l’USAID pour le financement de leurs propres activités et pour la survie des populations bénéficiaires de leurs programmes, les gouvernements et les ONG africaines ont été plus nuancées. En effet, certains ont fait valoir l’impact très limité de cette aide sur le terrain ; d’autres ont avant tout pointé son caractère pervers et intrusif ; une troisième catégorie a mis l’accent sur l’importance de travailler à l’autosuffisance et l’émancipation de l’aide[74]. « Je tiens à remercier M. Trump, car je pense qu’il nous a giflés non pas sur une joue, mais sur les deux », lançait même en mars le président zambien Hakainde Hichilema, affirmant qu’il était temps pour le continent d’assumer ses responsabilités en matière de développement[75].
Sur les réseaux sociaux, de nombreux abonnés africains ont paru se réjouir de la fermeture de l’USAID. Par ailleurs, Elom a publié sur Xun communiqué du Mali rappelant que bien avant la suppression de l’USAID, le Mali avait dénoncé la perversité et l’hypocrisie du système d’assistance internationale, dont les dangers portent en germe « la déstabilisation et la subversion de nos pays par le financement de réseaux terroristes et comme moyen de violation de la souveraineté de nos Etats »[76].
L’USAID n’est d’ailleurs pas le seul dispositif public d’aide internationale a avoir été ciblée par la nouvelle administration : le Millennium Challenge Corporation (MCC)[77], créée en 2004 par le président républicain George W. Bush, spécialisée dans le financement des infrastructures (routes, systèmes d’irrigation et réseau électrique), a lui aussi été supprimé le 23 avril 2025.
L’Afrique, victime de la charge contre le multilatéralisme ?
Depuis son retour au pouvoir, Donald Trump a multiplié les initiatives et déclarations contre les institutions multilatérales[78], dont la plupart sont présentes sur le continent africain, critiquant l’inefficacité et les lourdeurs bureaucratiques de ces organisations et leur coût financier pour les Etats-Unis. Il a décidé également de quitter l’Organisation mondiale de la santé et a décrété le gel des avoirs détenus aux Etats-Unis par les dirigeants, employés et agents de la Cour pénale internationale. Elise Stefanik nommée à la tête de la représentation permanente des Etats-Unis auprès de l’ONU conteste l’organisation, aussi bien sur le plan financier qu’en ce qui concerne les actions entreprises en son nom.
Cependant, il est important de souligner que si Donald apparaît aujourd’hui comme le fossoyeur d’un multilatéralisme auquel il s’était déjà attaqué sous son premier mandat, il ne fait en réalité que s’attaquer à un système d’ores et déjà à bout de souffle[79], déjà remis en cause sur le continent africain. L’impuissance des Nations unies à remplir le mandat de leurs missions de paix a de longue date suscité un très fort scepticisme puis une vive remise en cause de la crédibilité de l’organisation. C’est le reproche d’inefficacité qui est à la source des demandes de retrait formulées par des États comme le Mali face aux piètres résultats de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) forcée de quitter le Mali en décembre 2023. L’exaspération populaire face à la prolongation du mandat de la Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo/RDC (Monusco) a incité les autorités successives à demander, puis obtenir son retrait. La Mission intégrée des Nations unies pour l’assistance à la transition au Soudan (Minuats) s’est vue elle aussi appelée à quitter le pays.
Vers des restructurations de l’appareil diplomatique américain en Afrique ?
Selon certains médias[80], les États-Unis pourraient fermer une trentaine de représentations diplomatiques dans le monde, principalement en Afrique[81]. Les ambassades du Lesotho, de l’Érythrée, de la République centrafricaine, du Congo, de la Gambie ou du Soudan du Sud figureraient sur la liste des ambassades à fermer, tout comme les consulats de Douala, au Cameroun et de Durban, en Afrique du Sud. Des réductions d’effectifs pour l’ambassade américaine à Mogadiscio, en Somalie, seraient également étudiées. Cette réorganisation, démentie par Marco Rubio, devrait se traduire par un regroupement des ambassades par pôles régionaux[82]. Par ailleurs, l’actuel bureau pour l’Afrique au sein du Département d’Etat serait supprimé[83] et remplacé par un « Bureau de l’envoyé spécial pour les affaires africaines. Celui-ci dépendrait du Conseil national de sécurité directement rattaché à la Maison Blanche, et non plus du Département d’État[84]. Un tel dispositif confirmerait la personnalisation de la diplomatie des Etats-Unis en Afrique d’ores et déjà constatée à travers le rôle accru de Massad Boulos, homme d’affaires et politicien de nationalité libano-américaine, beau-père de la fille Tiffany de Donald Trump qui l’a nommé comme son Envoyé spécial pour l’Afrique[85].
L’équation économique : l’Afrique au prisme de la guerre commerciale et de la compétition pour l’accès aux ressources naturelles lancée par l’administration Trump 2
D’un point de vue économique, le traitement de l’Afrique s’inscrit dans la logique de l’offensive commerciale engagée par le Président Trump illustre la priorité donnée à l’accès aux ressources naturelles essentielles pour l’économie américaine. Le Conseiller au commerce de Donald Trump Peter Navarro appelait dans le fameux programme « 2025 » à renverser le « dogme » du libre-échange, cette idéologie qu’il qualifiait de « mondialiste élaborée dans une tour d’ivoire universitaire ». [86] Il est considéré comme l’un des cerveaux de la guerre commerciale menée par Donald Trump et appelle à répliquer fermement contre les barrières tarifaires mais aussi « non tarifaires » pour saturer de droits de douane les pays qui protègent leurs marchés par des normes et régulations. Il plaide pour une politique agressive envers la Chine, estimant que Pékin fausse les règles du libre-échange.
Promulguée par Bill Clinton le 18 mai 2000, l’AGOA (African Growth and Opportunity Act/Loi sur la croissance et les opportunités économiques en Afrique) facilite l’accès au marché américain pour une trentaine de pays africains en leur permettant à d’exporter des milliers de biens en franchise de taxes vers les Etats-Unis. Ce dispositif arrive à échéance en septembre 2025 et son renouvellement paraît peu probable. Cependant, malgré l’AGOA, les échanges commerciaux entre l’Afrique et les Etats-Unis sont faibles et n’ont cessé de décliner au cours de la dernière décennie. Les hausses des droits de douane annoncées par M. Trump auraient donc, selon son conseiller M. Boulos, un « effet net nul » pour la plupart des pays africains. Pourtant, certains d’entre eux ont violemment été touchés par les mesures tarifaires adoptées le 2 avril 2025, tels Madagascar et le Lesotho menacés de surtaxes s’élevant respectivement à 47 % et 50 %. En outre, certaines filières telles que le cacao, le textile ou la vanille sont susceptibles d’être particulièrement touchées[87]. L’Afrique ne représente toutefois que 3 % du commerce mondial et ses échanges avec les États-Unis restent extrêmement limités. En 2024, les exportations du continent vers les États-Unis s’élevaient à 49 milliards de dollars, dont 39,5 pour l’Afrique subsaharienne selon l’Office of the United States Trade Representative[88]. Le continent africain exporte principalement du pétrole brut (7,3 milliards de dollars), des métaux et des pierres précieuses (6,9 milliards de dollars), des véhicules automobiles (1,7 milliard de dollars) et des vêtements (1,4 milliard de dollars).
La course aux matières premières
Le 25 avril 2025, une déclaration de principes signée par le Rwanda et la RDC a été conclue sous l’égide des États-Unis. Cette Déclaration de Washington a l’ambition de promouvoir la paix et le développement économique dans la région des Grands Lacs, tout en mettant fin au conflit qui déchire l’est de la RDC. Le 1er mai, Massad Boulos a annoncé la mise en place d’un comité de suivi. Ce mécanisme est censé accompagner ces deux pays dans la mise en œuvre du processus de paix. Il réunit les États-Unis, le Qatar, la France et le Togo, ce dernier agissant au nom de l’Union africaine. Washington revendique haut et fort son rôle moteur dans le processus engagé. De manière assumée, la diplomatie américaine met en avant l’importance pour ses intérêts des immenses ressources minières, notamment des minerais critiques dont regorge le sous-sol congolais[89]. Les Etats-Unis ont annoncé d’importants investissements dans cette zone où l’on trouve notamment des minerais dits « 3T » : tantale, tungstène et étain mais aussi cobalt, coltan, lithium, tantale, essentiels aux technologies avancées, notamment pour les batteries des voitures électriques, pour les applications militaires et aérospatiales et dans la fabrication des appareils connectés.
Le Département d’Etat américain affirme que l’objectif de cette déclaration est de permettre aux deux pays de profiter des ressources naturelles abondantes dans la région, grâce à des partenariats économiques et des investissements mutuellement bénéfiques[90]. Le modèle ukrainien d’un échange de terres rares contre la garantie sécuritaire des Etats-Unis semble avoir inspiré une proposition du président congolais Tchisekedi transmise aux Etats-Unis via l’Africa Business Council[91], un groupe international de défense des intérêts des entreprises africaines et sénateur congolais Pierre Kanda Kalambayi, président de la commission sénatoriale de la défense, de la sécurité et de la protection des frontières de la RDC[92]. Les entreprises américaines pourraient acquérir ces actifs miniers critiques en échange d’un soutien accru au gouvernement de Kinshasa[93]. KoBold Metals, start-up spécialisée dans l’exploitation minière et l’intelligence artificielle, soutenue par Bill Gates, fait partie des entreprises qui convoitent l’immense gisement de lithium de Manono[94]. Les Etats-Unis pourraient ainsi contrer la présence chinoise en RDC que l’ancien Président Joseph Kabila avait négocié à travers plusieurs accords avec la Chine[95]. Sous Joe Biden, les États-Unis avaient déjà commencé à investir dans le corridor de Lobito, projet d’infrastructure qui prévoit la construction de voies ferrées et de ports pour exporter les minéraux de la RDC via l’Angola voisin. L’administration américaine semble aussi s’intéresser à l’uranium du Niger, ce qui pourrait expliquer que le pays n’ait pas été inclus dans la liste jaune des restrictions de visas d’entrée au Etats-Unis.
L’équation sécuritaire : L’AFRICOM, un commandement concerné par les réformes du Pentagone ?
Le Pentagone, dirigé depuis la prise de fonction de Donald Trump par le Secrétaire à la Défense Pete Hegseth[96], joue un rôle important dans la mise en œuvre de la politique américaine en Afrique, notamment à l’AFRICOM qui pilote les interventions militaires sur le continent. Le président américain a initialement lancé une vaste réorganisation du Pentagone[97], limogeant des officiers supérieurs et licenciant des milliers d’employés civils afin d’aligner l’armée américaine sur ses priorités[98]. En avril 2025, il a présenté une première version de son budget, prévoyant une hausse de 13 % des dépenses militaires tout en réduisant de 163 milliards de dollars les budgets civils. Le budget de la défense attendrait ainsi 1000 milliards de dollars[99]
L’AFRICOM (Commandement des États-Unis pour l’Afrique) est la dernière des six zones zones créées par le Département à la Défense (DOD) pour organiser la présence militaire américaine dans le monde. Avant sa création, la majorité des opérations et activités militaires menées en Afrique par les Etats-Unis relevaient du Commandement européen (EUCOM), à l’exception notable de l’Afrique de l’Est et de l’Égypte qui dépendaient du Commandement Central (CENTCOM), et de Madagascar qui dépendait de la zone Pacifique (PACOM). C’est le Président George W. Bush qui a décidé la création de l’AFRICOM en 2007 dont le champ de responsabilités couvre désormais l’intégralité de l’Afrique (à l’exception de l’Égypte, demeurée dans la zone de CENTCOM.
L’AFRICOM est un commandement unifié dirigé par un général 4 étoiles[100] qui coordonne les activités dans un cadre interarmées englobant les différentes composantes de l’armée américaine engagées en Afrique depuis son état-major basé à Stuttgart en Allemagne[101]. Les Forces navales américaines en Afrique (NAVAF[102]) sont intégrées à un commandement naval euro-africain et couvrent une vaste zone incluant la moitié de l’Atlantique, la Méditerranée et la mer Noire, et quasiment tout le continent africain. Ce commandement mène les exercices de la série Express, soutient les opérations antiterroristes, assure la protection maritime face aux menaces transnationales, et échange des stratégies pour une présence navale réactive. La Task Force 60 commande généralement les opérations navales dans cette région. Les Forces aériennes (AFAFRICA) et les Forces du corps des Marines (MARFORAF) assurent les capacités aériennes et terrestres. Des commandements subordonnés comme le Commandement des opérations spéciales pour l’Afrique (SOCAFRICA) mènent des missions spécialisées telles que la lutte antiterroriste. Enfin, la Force conjointe interarmées pour la Corne de l’Afrique (CJTF-HOA) s’attaque aux défis sécuritaires de l’Afrique de l’Est.
L’AFRICOM dispose de plusieurs bases militaires sur le continent africain. Certaines sont techniquement possédées par les gouvernements locaux et louées aux États-Unis. Le Camp Lemonnier à Djibouti est la seule base permanente américaine en Afrique, accueillant (plus de 4 300 soldats). En Somalie sont déployés 400 soldats ; l’AFRICOM y mène des raids aux côtés de militaires somaliens contre Al-Shabaab. En Afrique centrale, la base de Garoua (nord du Cameroun) soutient les opérations contre Boko Haram. L’AFRICOM coopère principalement avec les armées africaines à travers des activités de formation, d’entraînement (programmes IMET[103] ou Fintlock), d’équipement (hélicoptères, blindés, munitions, équipements tactiques), d’appui au renseignement, d’opérations antiterroristes conjointes, de réponses aux crises et d’opérations humanitaires.
Donald Trump a révélé que les États-Unis avaient mené des frappes aériennes contre l’État islamique le 1er février 2025 dans le nord de la Somalie[104], quelques semaines après l’attaque meurtrière à la Nouvelle-Orléans[105] revendiquée par le groupe terroriste. Il s’agissait des premières frappes menées à l’étranger depuis son investiture. La présence du groupe État islamique reste relativement faible en Somalie en comparaison de celle des Shebab affiliés à Al-Qaïda, mais un renforcement des affiliés de l’EI dans le pays, dirigés par Abdulqadir Mumin[106], a été signalé dans la région semi-autonome du Puntland[107]. Le Global Fragility Act[108] initié par Donald Trump lors de son premier mandat, mis en œuvre sous Joe Biden, devrait continuer à permettre à sept pays africains de bénéficier d’aides et de formations en matière militaire pour prévenir le djihadisme et assurer la stabilité du pays. Il n’est pas exclu que Donald Trump décide de reconnaître la souveraineté du Somaliland dont le port de Berbera est stratégique, comme évoqué dans le Projet 2025 pour parer à la détérioration des positions américaines à Djibouti (« against the U.S.’s deteriorating position in Djibouti »).
Conclusion
Le continent africain ne figurera pas plus en tête des priorités de Donald Trump qu’il ne l’a été pour ses prédécesseurs. Bien que des dynamiques tout à fait structurelles puisse faire évoluer la relation, l’Afrique restera un enjeu marginal sur l’agenda du Président américain, à moins que ce ne soit grâce à elle, à la faveur d’un investissement dans le règlement de l’un de ces conflits, qu’il puisse envisager de conquérir enfin l’un des seuls trophées qu’il considère manquer à son parcours : l’obtention d’un prix Nobel de la paix[109].
[1] https://www.courrierinternational.com/article/shithole-countries-vague-de-colere-contre-les-propos-offensants-de-trump Le programme « Prosper Africa » avait toutefois été mis en place à la fin du premier mandat Trump pour « développer les échanges bilatéraux entre les États-Unis et les pays du continent ». Ce projet a été mis en œuvre par la présidence Biden. Prosper Africa a mobilisé plus de 120 milliards de dollars et 2500 accords ont été conclus avec 49 pays.
[2] Bagayoko Niagalé, Afrique : les stratégies française et américaine en Afrique de l’Ouest, L’Harmattan, 2004.
[3] Le Congrès américain a toujours joué un rôle secondaire dans la politique africaine, hormis quelques initiatives majeures comme cet Anti-Apartheid Act ou sur le lobbying en faveur du Soudan. Certains membres, notamment du Black Caucus, se sont aussi investis dans les luttes anticoloniales et contre l’apartheid.
[4] https://bidenwhitehouse.archives.gov/briefing-room/statements-releases/2022/08/08/fact-sheet-u-s-strategy-toward-sub-saharan-africa/
[5] https://www.herodote.net/9_decembre_1992-evenement-19921209.php
[6] https://www.jean-jaures.org/publication/donald-trump-et-lafrique-acte-ii/
[7] Le document recommande de miser sur l’Afrique utile, en ciblant mieux les programmes, accords et aides au profit des pays « avec lesquels les États-Unis peuvent espérer une relation mutuellement bénéfique ».
[8] Il est important de ne pas considérer comme hermétiques les différents courants ci-dessous analysés : en effet, tantôt ceux-ci s’affrontent, tantôt ils se renforcent mutuellement et c’est Donald Trump qui est à l’origine de la synthèse de leurs contradictions ou complémentarités. Par ailleurs, certaines des personnalités citées peuvent se reconnaitre également dans l’autre vision. A titre d’exemple, Peter Thiel, tenant par excellente du techno-libertarisme, et Steve Bannon, actif promoteur du populisme identitaire, ont aussi apporté leur soutien à la promotion de l’intégralisme catholique incarné par J.D. Vance.
[9] Olivier Roy estime qu’« il y a plusieurs familles idéologiques qui se félicitent de la victoire de Donald Trump : une mouvance réactionnaire soutenue par une droite chrétienne, un populisme identitaire et une high-tech futuriste » : https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/03/29/l-internationale-reactionnaire-ou-comment-trois-familles-de-pensee-se-retrouvent-dans-leur-detestation-du-progressisme_6587631_3232.html Voir aussi : https://legrandcontinent.eu/fr/2025/03/28/les-droites-et-trump-crise-et-avenir-dune-tradition-politique/
[10] https://www.courrierinternational.com/article/geopolitique-l-afrique-du-sud-au-defi-de-l-organisation-d-un-g20-envers-et-contre-trump_227939
[11] A cet égard, le projet 2025 de la Heritage Foundation s’en prenait à propos de l’Afrique« aux conditionnalités de politiques jugées wokistes, pro-avortement et pro-LGBT, préférant axer les échanges sur l’économie, le sécuritaire – là est l’essentiel – et éventuellement les grands principes. Le think tank entend stopper la promotion de politiques nées des guerres culturelles américaines (« Focus on core diplomatic activities, and stop promoting policies birthed in the American culture wars »), des valeurs allant à l’encontre des traditions africaines ». https://www.jean-jaures.org/publication/donald-trump-et-lafrique-acte-ii/
[12] https://www.lefigaro.fr/flash-actu/l-ambassadeur-sud-africain-expulse-des-etats-unis-de-retour-et-sans-regret-20250323
[13][13] En janvier 2025, le président sud-africain a approuvé une loi autorisant le gouvernement à saisir des propriétés sans compensation dans certains cas, lorsque cela est dans l’intérêt public.
[14] https://www.courrierinternational.com/article/geopolitique-trump-offre-l-asile-aux-afrikaners-hilarite-et-consternation-en-afrique-du-sud_227594
[15] https://www.newyorker.com/news/q-and-a/make-south-africa-great-again
[16] https://www.rfi.fr/fr/afrique/20250430-ces-sud-africains-blancs-qui-veulent-l-asile-aux-%C3%A9tats-unis?utm_slink=rfi.my%2FBd5L
[17] En Afrique du Sud, la majorité des terres du pays appartiennent encore à la minorité blanche, dont les revenus sont en moyenne 20 fois supérieurs à ceux des ménages noirs.
[18] Fondamentalement doctrinaire, ce courant se réfère volontiers à des auteurs tels les philosophes réactionnaires du XIXème siècle Louis de Bonald et Joseph de Maistre (à travers une critique complotiste, antisémite et antimaçonnique de la Révolution française et du libéralisme politique), le juriste nazi Carl Schmitt, le décliniste allemand Oswald Spengler, l’ésotériste René Guénon, le royaliste antisémite Charles Maurras, l’occultiste fasciste italien Julius Evola, l’impérialiste russe Alexandre Douguine, ou bien encore la romancière et philosophe Ayn Rand. Parmi leurs références contemporaines, on recense notamment l’informaticien anti-égalitaire américain Curtis Yarvin, le philosophe antidémocrate anglais Nick Land ou encore Viktor Orban.
[19] Le Monde, ibidem
[20] Ce terme a été lancé en 2007par le magazine « Fortune ».
[21] Qui est David Sacks, le « tsar » de l’IA et des cryptoactifs nommé par Donald Trump ? | France Culture
[22] https://www.courrierinternational.com/article/etats-unis-elon-musk-peter-thiel-david-sacks-et-l-ombre-de-l-apartheid_222499
[23] https://afriquexxi.info/L-Afrique-dans-l-ombre-portee-de-l-extreme-droite-mondiale
[24] https://www.i24news.tv/fr/actu/international/artc-trump-reduit-l-aide-americaine-a-l-afrique-du-sud-en-represailles-a-sa-plainte-contre-israel
[25] Brent Bozell est notamment le fondateur du « Media Research Center », un observatoire conservateur des médias. Donald Trump avait initialement annoncé sa nomination à la tête de l’USAGM, agence chargée de superviser les médias publics américains diffusant à l’étranger, que le président américain a depuis entrepris de démanteler. Son fils avait été condamné pour l’assaut du 6 janvier 2021 sur le Capitole,
[26] https://www.lorientlejour.com/article/1426696/les-israeliens-en-campagne-aux-etats-unis-pour-que-pretoria-retire-sa-plainte-a-la-cij.html
[27] Margaux Bouaziz, « Élections et religions aux États-Unis », Revue du droit des religions [En ligne], 16 | 2023, mis en ligne le 21 novembre 2023, consulté le 01 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/rdr/2198 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rdr.2198
[28] https://theconversation.com/make-religion-great-again-la-place-de-la-religion-dans-letat-trumpien-253662
[29] https://www.lemonde.fr/international/article/2025/04/19/j-d-vance-le-converti-devenu-ideologue-du-catholicisme-postliberal_6597589_3210.html
[30] Apparu entre 2010 et 2015, l’intégralisme catholique a eu pour premiers adeptes des étudiants de prestigieuses universités américaines. Après 2016, cette tendance est devenue l’une des mouvances idéologiques les plus dynamiques du trumpisme, sous l’influence d’intellectuels dont l’adhésion au libéralisme politique a été remise en cause par la légalisation sur le mariage homosexuel.https://www.la-croix.com/a-vif/qui-sont-les-integralistes-catholiques-cette-jeune-garde-conservatrice-qui-soutient-j-d-vance-20241002
[31] Pour ces post libéraux catholiques, à défaut de dominer le pouvoir politique, l’Eglise doit inspirer l’Etat en lui servant de modèle jusqu’à justifier des tendances autoritaires et illibérales. Inspirée par l’école du droit naturel de Saint Thomas d’Aquin, leur vision s’inscrit davantage dans le sillage traditionaliste du concile de Trente (1545-1563) que dans le réformisme de Vatican II (1962-1965). Sans en remettre en cause directement le fondement, leur approche en propose une lecture qui relativise l’enseignement de Dignitatis humanae et paraît plus proche du patriarche Kirill de Moscou, d’obédience orthodoxe.
[32] Comme suggéré ci-dessus, le toujours très influent Steve Bannon est également proche de cette mouvance. https://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Monde/En-Italie-Steve-Bannon-fait-pape-Francois-nouvelle-cible-2019-04-24-1201017623
[33] Quand JD Vance a affirmé que les chrétiens devaient d’abord aimer leur famille, avant leurs voisins, leur communauté et leurs concitoyens, le désormais pape Léon XIV, alors Mgr Robert Francis Prevost, avait réagi sur X en republiant un éditorial cinglant titré «JD Vance a tort : Jésus ne nous demande pas de hiérarchiser notre amour pour les autres». https://www.lefigaro.fr/actualite-france/critique-de-jd-vance-immigration-violences-sexuelles-leon-xiv-un-pape-extremement-connecte-sur-les-reseaux-sociaux-20250509
[34] Le Pape François est perçu par ce courant comme ayant rompu la relation spéciale développée par le Vatican avec les États-Unis au cours des quarante dernières années, à travers d’une part l’anti-communisme de Jean-Paul II et d’autre part, la condamnation d’un Islam radical par Benoit XVI.
[35] https://legrandcontinent.eu/fr/p/cardinal-robert-sarah/
[36][36] Né en 1945 puis devenu plus jeune évêque du monde à l’âge de 34 ans, Robert Sarah a occupé les plus hautes fonctions au sein du Vatican, successivement secrétaire de la congrégation pour l’Evangélisation des peuples, président du conseil pontifical Cor unum chargé de la coordination des organismes caritatifs catholiques à l’échelle mondiale, puis préfet émérite de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements chargée de toutes les questions liturgiques. Ses ouvrages, notamment « La Force du silence » et « Dieu ou rien » (Fayard),se sont vendus dans différentes langues à des millions d’exemplaires dans le monde.
[37] La « Une » qui lui avait été consacrée par le magazine « Paris Match » avait été imposée à l’équipe éditoriale par Vincent Bolloré, fervent catholique et nouvel actionnaire du journal https://www.parismatch.com/Actu/Societe/Monseigneur-Robert-Sarah-Dieu-c-est-la-paix-1816538
[38] Vatican : quelles sont aujourd’hui les chances du cardinal Robert Sarah d’être élu ? • RFI : https://www.youtube.com/watch?v=K2tIu1r3MUk&t=56s . Parmi les autres « papabile » africains, figurent également le Congolais Fridolin Ambongo Besungu, particulièrement influent sur le continent, ou encore le Ghanéen Peter Turkson, proche du Pape François, tous deux très conservateurs sur les sujets de société, https://www.dw.com/fr/pape-africain-espoirs/a-72336419
[39] https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/monde/election-du-futur-pape-robert-sarah-le-chouchou-des-conservateurs
[40] https://www.africansecuritynetwork.org/assn/le-role-des-eveques-en-afrique-centrale/
[41] https://www.lexpress.fr/monde/europe/robert-sarah-le-cardinal-ultra-conservateur-favori-des-traditionalistes-pour-succeder-au-pape-SI25JIZMXJE3NH5CZN7LILZ5LM/?cmp_redirect=true
[42] « Les statistiques montrent qu’il y aura dans un avenir très proche un grave déséquilibre culturel, religieux et démographique en Occident. Décadent, sans enfants, sans familles, l’Occident disparaîtra, noyé et éliminé par une population d’origine islamique. L’Occident a renié ses racines chrétiennes. Mais un arbre sans racines meurt » Jean Sévillia, « Cardinal Robert Sarah : «L’Occident a renié ses racines chrétiennes»», https://www.lefigaro.fr/vox/religion/2016/10/14/31004-20161014ARTFIG00066-cardinal-robert-sarah-l-occident-a-renie-ses-racines-chretiennes.php
[43] Les cardinaux Brandmüller, Íñiguez et Zen.
[44] Tadonki, G.(2015). Géopolitique de l’Église catholique en Afrique au XXIe siècle. Outre-Terre, 45(4), 165-179. https://doi.org/10.3917/oute1.045.0165. https://shs.cairn.info/revue-outre-terre2-2015-4-page-165?lang=fr
[45] 27,2 millions d’enfants sont inscrits dans les écoles catholiques africaines.
[46][46] https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMAnalyse/3398
[47] https://information.tv5monde.com/afrique/lavenir-de-leglise-catholique-se-joue-t-il-en-afrique-2771138#:~:text=L’Afrique%20compte%20aujourd’hui,aussi%20de%20puissantes%20communaut%C3%A9s%20catholiques
[48] Dès le début des années 2000, le christianisme évangélique avait déjà favorisé l’élection de George W. Bush.
[49] https://www.amnesty.fr/actualites/aux-etats-unis-le-lobbying-des-evangeliques-menace-les-droits-humains
[50] https://international.la-croix.com/fr/monde/elections-americaines-les-catholiques-ont-choisi-donald-trump
[51] https://information.tv5monde.com/international/pourquoi-les-evangeliques-soutiennent-majoritairement-donald-trump-2745055
[52] Dorier-Apprill, É. et Ziavoula, R., (2005). La diffusion de la culture évangélique en Afrique centrale Théologie, éthique et réseaux. Hérodote, no 119(4), 129-156. https://doi.org/10.3917/her.119.0129
[53] https://www.jeuneafrique.com/90704/archives-thematique/l-afrique-eldorado-des-vang-listes/
[54] François Bozizé en RCA et feu Pierre Nkuriza au Burundi en ont été des exemples éloquents.
[55] https://www.liberation.fr/planete/2019/05/16/en-centrafrique-l-evangelisme-contre-les-forces-du-mal_1727461/
[56] https://mondafrique.com/international/les-eglises-evangeliques-porte-dentree-de-trump-en-afrique-centrale/
[57] https://afriquexxi.info/Des-Etats-Unis-au-Nigeria-la-fabrique-d-un-genocide-des-chretiens
[58] Il est d’ailleurs à cet égard intéressant de constater que l’Afrique du Sud fait exception car elle est l’un des Etats les plus libéraux du monde en la matière, reconnaissant même dans sa Constitution les droits des minorités sexuelles. https://www.lemonde.fr/afrique/article/2006/11/15/l-afrique-du-sud-est-le-premier-pays-africain-a-legaliser-les-unions-homosexuelles_834648_3212.html
[59] https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2024/01/africa-barrage-of-discriminatory-laws-stoking-hate-against-lgbti-persons/
[60] https://www.afrobarometer.org/publication/ad553-les-africains-sont-tres-divergents-quant-au-vaccin-covid-19-et-ne-croient-pas-que-leur-gouvernement-puisse-en-garantir-linnocuite/
[61] https://www.wathi.org/au-sahel-le-dereglement-climatique-a-bon-dos-afrique-xxi-novembre-2021/
[62] https://www.lexpress.fr/monde/steve-bannon-et-le-peril-du-populisme_2060041.html
[63] https://aoc.media/analyse/2024/01/09/afrique-des-mobilisations-citoyennes-aux-mobilisations-neopanafricaines/
[64] https://www.crisisgroup.org/fr/africa/sahel/mali/315-le-tournant-souverainiste-au-mali-ajuster-la-trajectoire
[65] Une « journée nationale de la souveraineté retrouvée » est d’ailleurs célébrée dans le pays depuis 2022 : https://sgg-mali.ml/fr/actualites/90/journe-nationale-de-la-souverainet-retrouve.html
[66] https://lignesdedefense.ouest-france.fr/les-forces-americaines-ont-quitte-leur-base-dagadez-au-niger/
[67] https://afriquexxi.info/L-Afrique-dans-l-ombre-portee-de-l-extreme-droite-mondiale
[68] https://fr.euronews.com/my-europe/2025/02/25/vote-dune-resolution-sur-lukraine-a-lonu-les-etats-unis-se-desolidarisent-de-leurs-allies-
[69] https://fr.africanews.com/2025/03/16/usa-22-pays-africains-sur-la-liste-des-restrictions-de-visas/
[70] https://www.iris-france.org/fin-de-lusaid-consequences-internationales-et-multisectorielles/
[71] https://information.tv5monde.com/afrique/suspension-de-usaid-quelles-consequences-pour-lafrique-2763530
[72][72] https://foreignassistance.gov/agencies
[73] Voir : https://www.census.gov/foreign-trade/balance/c0013.html
[74] https://www.courrierinternational.com/article/geopolitique-le-gel-de-l-usaid-une-occasion-pour-repenser-le-modele-de-developpement_228948
[75] https://www.lemonde.fr/afrique/article/2025/04/30/l-afrique-a-la-peine-pour-defendre-ses-interets-face-a-donald-trump_6602033_3212.html
[76] https://x.com/libsoftiktok/status/1894641544835011025/photo/1
[77] https://www.jeuneafrique.com/1682240/politique/apres-lusaid-donald-trump-met-fin-au-millennium-challenge-corporation/
[78] Frédéric Ramel. Politique étrangère de Trump 2: le détricotage renforcé du multilatéralisme. Analyse Opinion Critique, 2025 : https://sciencespo.hal.science/hal-04979901v1/document
[79] https://www.iris-france.org/trump-est-bien-le-fossoyeur-du-multilateralisme-mais-ce-nest-pas-lui-qui-la-plonge-en-etat-de-mort-cerebrale/
[80] https://www.nytimes.com/2025/04/15/us/politics/state-dept-expands-plans-for-closing-embassies-and-consulates.html
[81] https://www.jeuneafrique.com/1684228/politique/des-epees-de-damocles-planent-sur-plusieurs-ambassades-americaines-en-afrique/
[82] https://www.courrierinternational.com/article/les-etats-unis-prets-a-fermer-plusieurs-ambassades-en-afrique-tout-passe-par-des-rapports-de-force_230501
[83] La sous-secrétaire d’État adjointe aux affaires africaines reste pour l’heure Corina Sanders.
[84] https://www.rfi.fr/fr/afrique/20250421-les-%C3%A9tats-unis-en-passe-de-r%C3%A9duire-fortement-leur-pr%C3%A9sence-diplomatique-en-afrique
[85] https://www.rfi.fr/fr/am%C3%A9riques/20250402-massad-boulos-un-beau-p%C3%A8re-bien-plac%C3%A9-le-nouveau-conseiller-afrique-de-donald-trump-intrigue
[86] Initialement démocrate mais désormais particulièrement loyal envers le Président qu’il conseillait déjà sous son premier mandat, cet économiste avait été condamné à une perne de 4 mois de prison pour avoir refusé de coopérer avec l’enquête parlementaire menée sur l’assaut du Capitole, le 6 janvier 2021.
[87] https://www.jeuneafrique.com/1677561/economie-entreprises/cacao-textile-vanille-les-filieres-africaines-les-plus-exposees-a-la-guerre-commerciale-lancee-par-donald-trump/
[88] Le déficit commercial des États-Unis avec le continent est seulement de 7,4 milliards de dollars. À titre de comparaison, ce déficit s’élève à 157 milliards de dollars avec l’Union européenne en 2023. Voir https://www.lepoint.fr/afrique/trump-n-epargne-pas-l-afrique-dans-sa-guerre-commerciale-06-04-2025-2586629_3826.php
[89] A propos des dynamiques du conflit congolais, voir : « La deuxième guerre du M23 : Diagnostic, escalade militaire et perspectives de paix en République Démocratique du Congo » : https://afriquexxi.info/L-Afrique-dans-l-ombre-portee-de-l-extreme-droite-mondiale et https://www.africansecuritynetwork.org/assn/comprendre-les-ressorts-de-la-crise-a-lest-de-la-rdc/ et
[90] https://www.dw.com/fr/rdc-rwanda-dessous-d%C3%A9claration-washington/a-72371608
[91] Dans sa proposition, l’Africa Business Council a proposé :
- Accès aux mines de la RDC pour les entreprises américaines de défense et de technologie et accès à un port pour les exportations.
- Contrôle d’un stock commun de minéraux congolais à partager entre les deux pays.
- En échange, les États-Unis fourniraient une formation et des équipements aux forces congolaises et un accès direct à l’armée américaine en RDC.
[92] https://www.reuters.com/world/africa/after-tariffs-us-dangles-billions-dollars-congo-mineral-investment-2025-04-03/
[93] https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-revue-de-presse-internationale/la-revue-de-presse-internationale-emission-du-lundi-07-avril-2025-8164503
[94] https://www.ft.com/content/8b62cdda-8ab5-45ab-aeb0-91582ae18ca8
[95] https://www.aljazeera.com/news/2025/3/17/amid-conflict-why-does-the-drc-want-a-minerals-deal-with-trump
[96]https://www.lemonde.fr/international/article/2025/02/20/l-administration-trump-veut-reorienter-une-partie-du-budget-du-pentagone-pour-financer-ses-priorites-militaires_6555201_3210.html
[97] https://www.ifri.org/fr/articles/politique-etrangere/trump-2-les-defis-de-la-posture-militaire-americaine-politique
[98] https://www.ledevoir.com/monde/etats-unis/848170/trump-accuse-reorganiser-pentagone-mieux-politiser-armee
[99] https://www.opex360.com/2025/04/08/le-prochain-budget-du-pentagone-devrait-atteindre-1-000-milliards-de-dollars/
[100] Depuis 2022, l’AFRICOM est commandée par le général Michael E. Langley, vétéran de la guerre en Afghanistan et le premier Afro-Américain à avoir obtenu le grade de général quatre étoiles dans le Corps des Marines.
[101] L’enjeu de la location de l’AFRICOM a fait à ses début l’objet d’âpres débats. Certains pays comme le Botswana, l’Éthiopie, le Maroc et le Libéria avait proposé d’accueillir le quartier général de l’AFRICOM. Mais des figures comme Thabo Mbeki (ex-président sud-africain) et son ministre de la Défense s’y sont opposés, dénonçant une atteinte à la souveraineté africaine. En 2021, le Nigeria a proposé que le QG soit relocalisé en Afrique.
[102] https://www.africom.mil/about-the-command/our-team/us-naval-forces-africa
[103] https://2001-2009.state.gov/t/pm/65533.htm
[104] https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20250201-les-%C3%A9tats-unis-ont-men%C3%A9-des-frappes-a%C3%A9riennes-contre-le-groupe-%C3%A9tat-islamique-en-somalie
[105] https://www.france24.com/fr/info-en-continu/20250102-attaque-%C3%A0-la-nouvelle-orl%C3%A9ans-le-suspect-est-un-ex-militaire-inspir%C3%A9-par-le-groupe-etat-islamique
[106] https://www.dni.gov/nctc/ftos/isis_somalia_fto.html
[107] https://www.crisisgroup.org/united-states/united-states/trump-administrations-wars-terror-old-and-new?utm_source=mailchimp&utm_medium=email
[108] https://www.csis.org/analysis/global-fragility-act-unlocking-full-potential-interagency-cooperation
[109] https://www.rfi.fr/fr/podcasts/le-grand-invit%C3%A9-afrique/20250430-jeffrey-hawkins-trump-cherche-une-petite-victoire-diplomatique-en-afrique-pour-briguer-un-prix-nobel