Les auditrices et auditeurs en visite à Istres, au sein du site de Dassault Aviation Essais en vol.
Les auditrices et auditeurs de la 29ème session méditerranéenne des hautes études stratégiques se sont retrouvés au château de Cadarache le 17 octobre 2018 pour le séminaire inaugural consacré aux grands enjeux de la géopolitique de l’énergie.
Monsieur Patrice GOURDIN, docteur en histoire, professeur d’histoire contemporaine à l’Ecole de l’Air et chercheur associé de l’Institut d’Études Politiques d’Aix-en-Provence, a prononcé la première conférence du séminaire, baptisée « introduction à la géopolitique ». Le thème d’étude de la session portant sur les conséquences géopolitiques de l’exploitation des gisements d’hydrocarbures en Méditerranée orientale, le professeur a choisi d’illustrer son propos par une étude de l’île de Chypre, après avoir rappelé la définition de la géopolitique, l’étude des rivalités de pouvoir (ou d’influence) pour un territoire donné.
La matinée du 18 octobre a permis la découverte des installations du centre de Cadarache, un des 9 centres de recherche du Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives (CEA). Les auditrices et auditeurs ont été tout d’abord reçus dans l’enceinte sécurisée de l’Unité de Propulsion Nucléaire, rattachée au centre DAM/Ile-de-France. Ils y ont reçu une information sur la conception et la réalisation des chaufferies nucléaires et des cœurs associés, avant de visiter le réacteur d’essais RES, un réacteur compact à eau pressurisée semblable aux chaufferies nucléaires assurant la propulsion des sous-marins français et du porte-avions Charles de Gaulle.
La visite s’est prolongée par une présentation des vingt installations nucléaires de base, disséminées sur les 900 hectares clôturés du site de Cadarache. Parmi celles-ci, de nombreux réacteurs de recherche, dont le réacteur Jules Horowitz qui, outre sa capacité expérimentale pour étudier le comportement des matériaux et des combustibles sous irradiation, contribuera également à assurer une part importante de la production européenne de radioéléments nécessaires pour l’imagerie médicale.
A l’issue du déjeuner offert par la direction du CEA Cadarache, les auditrices et auditeurs ont bénéficié d’une visite du chantier ITER, « un des plus grands défis de notre civilisation ». Situé à Cadarache à proximité immédiate du CEA Cadarache, le chantier concrétise le développement d’une recherche pacifique sur l’énergie de fusion, proposée en novembre 1985 par Mikhaïl GORBATCHEV au président américain Ronald REAGAN. Le tokamak (acronyme russe pour « chambre toroïdale, bobines magnétiques »), qui pèsera 23 000 tonnes, doit démontrer la maîtrise des technologies requises par un réacteur de fusion. ITER est une étape indispensable pour préparer les réacteurs commerciaux. Le calendrier, validé par les conseils ITER réunissant l’Union européenne, les Etats-Unis, l’Inde, la Chine, le Japon, la Corée du Sud et la Russie, prévoit la génération du premier plasma en 2025 et les premières fusions de deutérium et de tritium en 2035.
De retour au château de Cadarache, les auditrices et auditeurs ont été initiés aux secrets de l’énergie hydroélectrique et des responsabilités d’EDF dans la gestion de l’eau, « une richesse convoitée et contrainte ». S’appuyant sur l’expérience de l’unité de production Durance Méditerranée, le conférencier (et ancien auditeur) Vincent RIVIERE, a présenté la complexité du partage de la ressource, lorsqu’il faut aux ingénieurs d’EDF maintenir une cote des retenues d’eau compatible avec les activités touristiques tout en soutenant les débits à l’aval pour l’irrigation, favoriser les sports en eau vive sans mécontenter les pêcheurs, et bien sûr savoir « turbiner » en réponse à une pointe de consommation électrique. L’hydroélectricité, première des énergies renouvelables, représente environ 10% de la production d’EDF et une économie de 13 millions de tonnes équivalent au pétrole. La conférence s’est achevée par un survol des principaux conflits potentiels autour de l’eau et des bassins du Mékong, du Nil ou du Tigre et de l’Euphrate, une occasion de découvrir la convention de 1977 sur le droit relatif aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation.
Profitant de la proximité des bases aériennes de Salon de Provence et d’Istres, la matinée du 19 octobre a été consacrée à l’Armée de l’air et aux forces aériennes. Après une présentation générale des missions de l’Armée de l’air et de la vision du chef d’état-major par le commandant en second de l’Ecole de l’air, les auditrices et auditeurs ont été reçus par le commandant du centre de formation aéronautique militaire initiale. Ce centre assure l’initiation au vol ainsi que la formation théorique et pratique des futurs pilotes et navigateurs de chasse, de transport et d’hélicoptère au sein de l’Armée de l’air, de la Marine nationale ainsi que de la Direction générale de l’armement. Pour mener à bien sa mission, il dispose d’un escadron d’initiation au vol à voile, de deux escadrons d’instruction en vol pour les pilotes ainsi que de l’escadron de formation des navigateurs de combat.
Quelques dizaines de kilomètres et de minutes plus tard, les auditrices et auditeurs ont été accueillis par deux anciens auditeurs de Dassault Aviation pour une après-midi consacrée aux essais en vol. Les Essais en Vol (Direction des Essais en Vol et Direction des Bases d’Essais) sont en charge des essais globaux, au sol et en vol, de développement et de qualification/certification des avions civils et militaires, de leurs systèmes embarqués et de leurs systèmes de soutien. L’historique des essais en vol au sein de la société Dassault Aviation a permis de comprendre comment, depuis les temps héroïques où le pilote d’essais « allait voir », l’ingénierie et l’électronique ont permis de préserver la vie des pilotes, tout comme le rôle déterminant de Serge DASSAULT, qui fut directeur des essais en vol de 1955 à 1961, ou le traumatisme causé par la mort en 1967 aux commandes d’un Mirage F1 de René BIGAND, ancien officier de l’Armée de l’air et chef pilote d’essais depuis 1959.
Ce premier séminaire a été conclu le 20 octobre par une conférence prononcée à la Maison du Numérique et de l’Innovation par le vice-amiral d’escadre Charles-Henri LEULIER de la FAVERIE du CHE. Préfet maritime de la Méditerranée, commandant l’arrondissement et la zone maritime Méditerranée, CECMED a présenté les enjeux géopolitiques de sa zone de responsabilité, un espace stratégique restreint qu’un bâtiment peut parcourir en une journée de nord en sud et en quatre jours d’est en ouest. Marquée par les zones d’instabilité de Libye, de Syrie mais également d’Ukraine, la Méditerranée héberge 25 % du trafic maritime mondial, 30 % du trafic d’hydrocarbures et les deux tiers des approvisionnements de la France. Rappelant que la Méditerranée était également un espace convoité pour ses ressources, le vice-amiral d’escadre du CHE a terminé sa conférence par quelques conseils au profit des auditrices et des auditeurs, orientant ainsi les travaux qu’ils seront menés à conduire au fil des huit prochains séminaires.
Après la visite du chantier ITER