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- Date de création 17 mars 2018
- Dernière mise à jour 1 octobre 2018
"Pour la première fois depuis la fin de la Guerre froide, le Parlement est appelé à se prononcer sur un projet de loi de programmation militaire qui ne prévoit ni déflations, ni fermetures de bases militaires, ni annulations, réductions de cibles ou étalements de programmes d’armement, mais organise, a contrario, la remontée en puissance des moyens de la Défense au cours des sept prochaines années.
Ainsi, à travers ce projet de loi, l’engagement formulé par le Président de la République de faire converger le budget de la Défense vers les 2% du PIB prend corps.
Il est certain que la dégradation de la situation internationale appelle une réaction forte. Deux ans après les attentats de Paris et de Nice, la menace terroriste reste très présente et continue de se nourrir des vides sécuritaires et des ressentiments, en Asie, en Afrique et jusque notre sol. À côté, la résurgence des stratégies de puissance, mettant en cause l’ordre international, se fait de plus en plus palpable. Elles se déploient dans tous les milieux, terre, air, mer, mais aussi dans l’espace et le cyberespace, qui, pour être moins visibles, n’en sont pas moins stratégiques. Et la nucléarisation de la Corée du nord a ravivé le spectre d’une escalade nucléaire incontrôlée.
Ainsi, alors que les menaces se multiplient et que la planète se réarme, la France est mise au défi. Elle est mise au défi de conserver son avance technologique, que la diffusion des technologies et la montée en puissance de nouveaux acteurs mettent à mal. Elle est mise au défi de préserver sa vocation mondiale, alors qu’elle se trouve concurrencée par d’autres sur ses points d’appui traditionnels, et qu’elle peine à assurer sa souveraineté maritime au sein de son immense zone économique exclusive. Elle est mise au défi de pouvoir continuer à intervenir dans les crises mondiales, quand son armée est fragilisée par des engagements intensifs et des années de sous-investissement accumulé. Elle est mise au défi de justifier son statut de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, garant d’un ordre international de plus en plus contesté.
Dans ce contexte, d’aucuns objecteront que la trajectoire proposée par le projet de loi de programmation militaire est insuffisante, qu’il aurait fallu faire plus, plus vite. Néanmoins, il faut prendre en compte le point de départ, et ne pas négliger d’autres enjeux de souveraineté nationale comme la réduction de notre dette publique.
Au total, le présent projet de loi prévoit en faveur de la Défense une programmation budgétaire aussi responsable et engagée que possible. Elle s’appuie sur des ressources fiables, procède à une évaluation réaliste des coûts, et s’attache à réparer les nombreuses fragilités apparues au sein de notre outil de défense, renonçant à toute ambition grandiloquente qui serait déconnectée de la réalité. Elle donne la priorité au facteur humain, aux militaires, qui font aujourd’hui la réputation de l’armée française à travers le monde, à côté d’armées bien mieux dotées comme celle des Américains.
Ce faisant, le projet de loi de programmation militaire pose la première pierre d’une remontée en puissance appelée à se poursuivre au-delà des élections présidentielles de 2022.
Le rapport annexé au projet de loi souligne le lien entre l’autonomie stratégique de la France et celle de l’Union européenne. À côté de poids lourds comme la Chine ou les États-Unis, face à des enjeux qui ne connaissent pas de frontières, la France n’a pas la taille critique pour espérer pouvoir tout faire toute seule. L’Europe partage des intérêts économiques, des intérêts de sécurité et connaît un haut degré d’intégration politique : il semble donc naturel qu’elle s’attache à construire son autonomie stratégique.
Et pourtant, c’est loin d’être facile. C’est peut-être là  l’un des enjeux les plus forts de la programmation militaire envisagée. La coopération avec nos partenaires, en particulier européens, en est un postulat essentiel, même si elle n’en constitue pas le cœur.
À cet égard, nous verrons que des initiatives récentes ont posé les bases de cette autonomie stratégique européenne. La France doit impérativement les aider à mûrir. L’initiative européenne d’intervention proposée par le Président de la République pourra jouer un rôle positif en ce sens, en rapprochant les cultures stratégiques des Européens.
En complément, votre rapporteure juge utile de saisir l’opportunité de cette loi de programmation pour envoyer des messages positifs à nos partenaires sur notre volonté de construire quelque chose avec eux. C’est en effet d’abord sur les perceptions que se jouera l’avenir de coopérations que nous savons aujourd’hui essentielles pour espérer peser dans les affaires du monde."
Le site de l'Assemblée nationale ⇒