Patrouille des forces de l’ordre à Buéa, dans le Sud-ouest du pays.
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L’élection présidentielle se tiendra dimanche au Cameroun où le Président Paul BIYA, au pouvoir depuis 1982, brigue un 7ème mandat consécutif. L’élection se déroule sur fond de tensions et de guerre civile avec le Cameroun dit anglophone.
Dans ce pays aux 24 millions d’habitants, 20% de la population seulement est anglophone, vivant principalement dans deux régions à l’Ouest près de la frontière avec le Nigéria. Depuis deux ans, ces régions sont en proie à des affrontements violents entre le mouvement séparatiste anglophone de l’Ambazonie et l’armée régulière du pouvoir. Les exactions sont légion : exécutions de femmes et d’enfants, décapitations, routes coupées ou encore villages brûlés. Les séparatistes s’attaquent à Yaoundé et ciblent les symboles de l’Etat. Alors que le pays connait un exode massif touchant plus de 400 000 personnes, ce conflit trouve son origine dans le découpage colonial. Au sortir de la Première guerre mondiale, le Cameroun, sous protectorat allemand, se trouve découpé entre puissances française et britannique, selon le schéma que l’on retrouve actuellement. Au fil des décennies, grandit l’humiliation subie par la population anglophone qui se sent marginalisée et exclue du pouvoir. La crise camerounaise prend une dimension protéiforme avec les attaques au Nord par Boko Haram et les conséquences humanitaires, sociales et économiques engendrées par le conflit. Les usines fermées paralysent l’économie du pays et les recettes d’exportation du café et du cacao, ont chuté de 20%.
Pourtant, Paul BIYA dissimule et minimise l’importance de cette guerre civile, la qualifiant simplement de « troubles ». L’ampleur des événements a éclaté dernièrement sur les réseaux sociaux, dans un Cameroun où le Président contrôle d’une main de fer son pays et notamment les médias.
En juin dernier, Nikki HALEY, ambassadrice américaine aux Nations Unies, a demandé aux autorités de Yaoundé d’arrêter la répression des populations civiles et de respecter les droits de l’Homme, la liberté d’expression et surtout, de mener des « enquêtes crédibles » concernant les massacres. Julie de RIVERO, du département Afrique du Haut-Commissariat des Nations-Unies aux droits de l’Homme, fait part du souhait de « réaliser des enquêtes pour aider les autorités à répondre à cette situation en respectant les cadres des droits de l’Homme » mais déplore n’avoir pas reçu « d’avis favorable pour pouvoir mener ces enquêtes ».
D’ailleurs, s’agissant du scrutin du 7 octobre, le Cameroun n’a pas désiré bénéficier d’observateurs européens. Si les bureaux de vote se feront rares dans les régions dissidentes, pour la revue African Arguments, il y a fort à parier que Paul BIYA sorte une nouvelle fois vainqueur des élections : « Malgré une corruption record et la crise qui s’accentue dans les régions anglophones, le scénario de l’élection de 2011, où Paul BIYA a réuni près de 78% des voix, a de grandes chances de se répéter ».